Nulle part se rendre sans être poursuivi,
Nul rivage baiser sans la pression des lèvres,
Nul endroit arpenter sans l'image spectrale
D'un fantôme charnel nullement dissolu.
Si l'on se perd, on s'est perdu :
On sait perdu les âges nus
Où l'on entend les pas perdus.
Nulle part le rendre, le poids de la nausée,
Nul paysage rêver sans embrasser les dunes,
Nul envers retourner sans en miroir pâlir
D'un sourire effacé, d'une âme résolue.
Si l'on se perd, on s'est perdu :
On sait perdu les âges nus
Où l'on entend les pas perdus.
Nulle part les rendre, les mots, la paix, les armes,
Nul présage mentir sans l'illusion du son,
Nul revers essuyer sans que brille l'absence
D'un billet mal écrit de maux infirmes et vides.
Si l'on se perd, on s'est perdu :
On sait perdu les âges nus
Où l'on entend les pas perdus.
Nulle part à rendre, quand il ne reste rien,
Nul visage franchir d'une geste inverse,
Nul détroit charpenté sans robe des marées
Décolorées, grisées d'un mutisme salin.
Si l'on se perd, on s'est perdu :
On sait perdu les âges nus
Où l'on entend les pas perdus.