dimanche 30 septembre 2012

Bouteille échouée : Second partage : Avant et après, le vide


 
     Un hasard, oui, quoi d'autre ? Des millions d'individus autour de nous, des milliards au total, des vivants, des morts, des pas-nés... Logique que tout cela soit de la loterie. Alors ça trie, on trie malgré nous toute la journée les êtres qui ne nous conviennent pas dans une grande foire de l'a priori, du préjugé, où l'orgueil et la bêtise sont rois ! On refuse telle personne, on nous refuse, de concert, tout le temps. Je ne le voyais pas tout ça avant. Pas bien. Des miettes, je devinais un peu, rien de net. Seul de toute façon, depuis que je pense, je sais que je le suis, seul, du premier au dernier jour. Penser, c'est ça, c'est s'isoler, avoir un petit temps pour se voir, seul, dans la mélasse de nos vies vides.
     Je me souviens très bien, elle m'avait déjà vu, repéré, sélectionné, comme on met ses courses dans le chariot... Eté 1990. Dix-huit ans. Jeune, presque insouciant, courant après un ballon avec les gosses de la colo derrière moi. Je l'avais à peine sortie du lot, plus âgée, au ménage, pas les mêmes horaires. Je n'y pensais pas à cette femme, je pensais à la femme en général, celle qui s'écartait de mes mains alors que j'avais tant besoin d'elle.
     Dix-huit ans, une seule expérience au lit, un été avant, rien compris. Dix-sept ans. 14 juillet 1989, le feu d'artifice du bicentenaire... Ce sexe qui pointe et qui se repose après, sans avoir pénétré vraiment, atteint ses objectifs. Petit pétard mouillé. Bander toute la journée pour arriver à ça la nuit, tendu, détendu, tendu, retombé... Tant de gentillesse pourtant chez cette jeune femme, si douce et attentionnée. J'ai oublié son nom. Elle était opiniâtre, ne faisait pas attention à mon copain, à côté de nous, dans la tente, qui faisait semblant de dormir, les cils trahissant l'activité de ses yeux, pauvrets palpitant sous sa paupière. Elle enserrait mon engin paumé gentiment entre ses lèvres pour qu'il retrouve un sens, quelque chose. Le matelas de mon copain qui se dégonfle en même temps que moi... Dix-sept ans, toujours cette sensation de ne pas vivre, de ne pas savoir comment faire, pour étreindre quoique ce soi.
     Un hasard, des mots échangés, imprévus, imprévisibles. J'ai un peu bu, cet été 1990, à la première fête entre animateurs. La lune est haute au-dessus de nous, bien tranchante. Le Garbet, petit torrent joyeux, perce un sillon dans l'herbe fraîche dans laquelle mon corps a versé, aidé, poussé même par cette femme, plus âgée, plus expérimentée en tout. J'avais sur sa demande récupéré deux verres et une bouteille à la fête pour nous les amener dans le nid douillet des herbes hautes, à une cinquantaine de mètres. Le monde est beau entre les brins, sous la lune, croissant fin de Moulhule. Elle contrôle tout, ses regards, la bouteille, me flatte, loue mon corps, me pose dix questions, me parle de ma sœur qu'elle connaît de l'été dernier. Je suis, comme je peux, dépassé en tout, la question de savoir si elle me plaît n'est même pas posée à l'intérieur de ce qui reste de mon crâne en feu. Ses lèvres arrivent avant que les miennes s'entrouvrent, je suis, comme je peux. C'est bon les lèvres, sa langue qui cherche la mienne, lèche mes lèvres qui semblent comprendre enfin ce qui se passe, petit message au cerveau, vannes qui s'ouvrent. Le nombre des étoiles varie au-dessus j'en suis sûr. La lune aussi accélère. C'est cette année je me souviens que j'ai suivi les trajets de l'astre. Là, à se mordre les lèvres, la bouteille renversée, les verres égarés, je suis bien. Des pas nerveux nous frôlent, l'herbe chante pas loin de nous mais elle m'attire, je ne vois rien, elle m'attire contre elle, contre son sein. Elle m'invite dans sa chambre, là, tout de suite. Je bande. J'ai peur. Pas d'autres rencontres entre les deux étés. Peur de ne pas réussir à bander pour elle, pour toutes les femmes. Peur de vivre sûrement. Je la suis, comme je peux dans son bâtiment, gravis comme je peux les cent cinq marches jusqu'à sa chambre. Tout tourne encore après la cage d'escaliers. Elle sort une bouteille de whisky d'un bidet improbable posé là dans le renfoncement qui doit être sa salle d'eau. Je n'ai pas besoin d'un verre de plus. Mais je suis servi, on est sur son lit, on boit, boire et embrasser, encore. Je ne sais pas de quoi on parle, je sais ses doigts, son corps qui se presse contre le mien, sa joue douce avec son petit duvet de poils. Ses doigts qui me cherchent, me trouvent, s'amusent à renverser mon corps. Je lui dis je pense que je suis comme vierge, pas que j'ai peur. Elle rit, ce qu'elle peut rire... Elle me flatte, des mots et des gestes d'une tendresse bouleversante. Pourquoi on ne me touche pas comme ça, pourquoi on ne me dit pas ces mots tous les jours ? Elle rit, cesse, mange ma bouche, rit encore. Je ne sais toujours pas si elle me plaît, ça ne se choisit pas ça sûrement, ça se fait sans nous au moment où l'on pourrait se poser la question mais nos corps eux savent et trient, bien en avance sur nous.
     Me caresser le sexe lui semble naturel, moi je saute, je sursaute, mes poils entortillent mon gland, j'ai mal, je mouille, pas du sperme, pas déjà... Je ne sais rien à part sauter sur son lit, me trémousser comme une jeune première. Peut-être rit-elle encore au-dedans d'elle, tout est possible vu la créature. Elle me déshabille, j'essaie de ne pas arracher son soutien-gorge, ma sœur m'avait montré pourtant quand j'avais douze ans... Pas moyen, elle plie ses bras derrière elle, comme un oiseau qui se met à marcher après avoir volé dans un vent trop violent, et ôte la pièce. Ses seins sautent à leur tour, pas que moi qui saute, ça rassure. Deux perles dans la nuit, longues, effilées, comme des larmes qui n'auraient jamais vraiment réussi à pleurer. Une envie, non un besoin, de les avaler, de les sucer. Les mots ne servent pas tout le temps. Les perles les surpassent. De loin.
     Un hasard, des mots échangés, et c'est le début d'une relation. Peu de mots, les corps s'élancent après quelques petites phrases, histoire de vérifier qu'ils le peuvent, dans la nuit, sous la lune. Notre relation, un drôle d'échange... Comme un entraînement à la vie, à l'amour, à l'escalade des corps. Elle me montrait les voies, j'essayais de saisir les bonnes prises. Son plaisir, je me demande bien où elle le trouvait. Le mien, toujours fulgurant, toujours premier. Et trois fois sur le métier je remettais mon ouvrage, réserve de sperme intacte, une véritable outre mes bourses... Seules les irritations et l'épuisement nous poussaient à souffler un peu, à lâcher nos corps aimantés. C'était ça, l'amour ? Vraiment ?
     La première nuit, épuisé, saoul de plaisirs, je prends l'escalier de secours pour ne pas réveiller les enfants. Je tangue jusqu'aux toilettes. Une sorte de soulagement dans l'urine, la vie, se vider, se remplir... Je chante, oubliant les enfants endormis dans ces dortoirs inhumains. Je chante un bon vieux Gainsbourg, de toutes les circonstances le bougre! Marilou, « Après l'amour pisser sagaie ». Seul au monde, ma queue, ma voix et moi. Du moins, je le croyais. Une ombre, une sorte d'homme, recroquevillé, pas plus lourd qu'un fantôme, me parle, s'adresse à moi, je ne le connais pas. Sa voix est si faible... Je rentre ma chanson, elle devient vulgaire dans d'autres oreilles. La forme humaine me demande si j'étais avec elle, m'explique entre deux sanglots qu'il est son ami. Je ne peux nier, après mes paroles chantées, « record à corps homologué », je présente mes excuses à cette absence de gravité. C'était lui qui faisait chanter et crisser l'herbe à côté de nous tout à l'heure. Il abonde en pleurs, je vais me coucher, la tête débordée.
     Le lendemain je lui dis que j'arrête avec elle, qu'elle aurait pu me dire pour son ami, que j'ai peur sans préservatif, que je ne vois pas pourquoi on continuerait. En trois mots, elle me calme, leur histoire est terminée, il s'accroche, elle a fait un test avant l'été, elle me veut...
     Son ami, ensuite, elle l'a poussé dans l'escalier quand il insistait pour que leur histoire continue. Elle me le dit comme ça, entre deux verres, une nuit. Elle rit en évoquant sa surprise et sa chute, son bras tordu, plâtré. Je ris pour l'accompagner dans son rire.
    Cinq semaines à arpenter son corps, un jouet infini. Elle me parlait, m'indiquait quoi faire, où m'attarder, comment. Mais mon corps tendu comme une flèche exultait, suait, écrasait, mangeait. Après l'amour, l'amour encore et la douche, l'amour encore sous la douche, toujours quand elle me savonne, quand ses doigts glissent savonneuses entre mes fesses. Debout, au lit, sur le rebord de la fenêtre, tout le temps. Il m'arrivait en pleine journée, au moment du goûter, de laisser mon groupe d'enfants pour monter la voir, un petit whisky sec et l'amour en deux minutes, contre le mur. Et je redescendais la volée de marche pour ranger le goûter et reprendre la partie de foot ou de gendarmes et voleurs.
    Elle me murmurait toujours des mots incroyables à l'oreille pendant l'acte. Prends-moi, par derrière, plus vite... Je m'exécutais. Je découvrais ce que je pensais être la vie. A fond. Je ne voyais pas de fin à ces pratiques, je crois même que j'étais bien avec elle, comme ça. Dormir avec elle en secret, rejoindre mon dortoir à 6h30 tous les matins, dans le silence et la brume. J'aurais fait ça toute ma vie, ses lèvres et sa langue avalant tout mon corps d'adolescent dégingandé et attardé, sa folie, ses lectures, sa soif infinie, son corps mûr à point... Qu'avais-je fait avant de la rencontrer ? Avant elle, le néant. Je ne pouvais pas penser qu'après j'embrasserai de nouveau le vide.
     Un hasard, des mots échangés, et c'est la fin de cette même relation. Trois jours avant la fin de la colonie, elle a lancé sa bombe, ces quelques mots, avec un air détaché, plein d'assurance même. Elle est enceinte. De moi, bien sûr, qui d'autre ? Si si elle prend la pilule mais ça peut arriver quand même. Je pouvais me protéger si j'avais voulu. Elle me dit savoir que je ne peux rien assumer, que notre histoire n'en est pas une. Chacun de son côté, c'est mieux. Elle ne répond pas à mes questions, comment c'est possible, veut-elle le garder... Elle me sourit, me fait bien comprendre que je ne peux pas suivre, que je ne peux rien faire. Ne pas pouvoir.
     Pendant six mois j'ai guetté son ventre, caché dans la rue, à l'attendre. Rien. Rien ne semblait pousser. Une nuit, je sonne chez elle, avec un ami. Nous avons déraillé les chaînes de nos vélos et barbouillé nos mains de cambouis. On monte les laver, dix minutes, pas plus, ça va, oui, et toi, oui, tu veux boire un truc, oui, je vous présente Pierre, mon patron. Pierre en peignoir, la trentaine, manifestement du genre à sauter sa secrétaire. Elle est en peignoir aussi, les joues rouges, on boit notre verre, toujours le même whisky, brûlant et sans goût, elle allume un vieux film, Sacré Graal. Le chevalier noir perd ses membres, un à un, personne ne rit. Son ventre ne semble pas gros.
     C'est la dernière fois que je l'ai vue, en peignoir, le verre à la main, à côté de son patron, les joues rouges.
     Avant le néant, après le vide.
 
Hervé le dervé
 
 
Librement inspiré des phrases : "Comment pouvait-on disparaître aussi facilement de la vie de quelqu'un ? Peut-être avec la même facilité, en définitive, qu'on y entrait. Un hasard, des mots échangés et c'est le début d'une relation. Un hasard, des mots échangés, et c'est la fin de cette même relation. Avant, néant. Après, le vide." d'Antoine Laurain, Le Chapeau de Mitterrand.

Des sueurs froides

 
  
          Il ne pleut pas. Le ciel est dégagé, un bleu pâlot de réveil. Le temps de secouer sa tronche empâtée. Pourtant, la toiture ruisselle d'un léger clapotis, calqué sur le gazouillis des oiseaux. Pourtant, à y regarder, dessous les grands frênes du jardin, de longs filaments argentés balancent leur miroitement dans l'absence de vent. De petites larmes de la nuit se retiennent sur les membres du grillage.
          C'est qu'elle en a eu, la nuit, des sueurs froides, de ne pas se voir en finir.
   
 

Du roulement à bile

  
  
tu sais bien faire, ça, rouler
les clopes dans tes doigts fins
les faims dans le tabac
les bas-côtés sur la droite
la droiture dans la farine
la narine dans la tension
l'attention des autres sur le ton
le ton calme sur le visage
l'âge derrière la barbe
la peau arabe sous le soleil
l’œil dans son mystère
les stères pour ton bûcher
ça semble bien plus facile
quand on est une roulure
  
 

samedi 29 septembre 2012

De ce chant-là

  
  
          Ce serait un peu Jeff qui aurait bouffé ses bonbons, ses bouquets de fleur et ses ardoises sous ses cheveux longs. Ce serait un peu Jeff qui chanterait à Marie, à Mathilde, aux Madeleines, les pas de son pays, sur les volcans noirs et bouffis. Ce serait un peu Jeff qui mélangerait les rouges et les noirs pour toutes ces filles belles qu'il croise le soir. Qui tuerait les cadres en bois, les familles, déplacerait les Marquises, juste pour elles. Ce serait un peu Jeff qui aurait tué tous les chats pour habiller les froids de son corps maigre. Qui attendrait l'Emile, passé chez les bourgeois, mais qui n'attendrait plus. Qui garderait le croquant tout en regardant Marcel qui cramerait la dernière scène. Sans oublier qu'on ne quitte pas totalement, qu'on ne fait qu'habiter, qu'on ne fait que s'y habituer. Qui ira voir par là, si le diable ça va, la valse suivante dans les îles de là-bas. Ce serait un peu Jeff qui aurait appris à danser, après avoir su jouer, et qui jouerait qu'à danser. Ce serait un peu Jeff qui se serait réveillé après bien des années. Et qui fout le frisson...
 
  

vendredi 28 septembre 2012

De la cueillette : De l'escalade


  
          Il y a ceux pour qui compte d'atteindre le sommet de la tour, de gré ou force, quitte à ce qu'elle s'effondre.
          Il y a ceux qui escomptent faire atteindre le sommet de tours, fors le gré d'en être quitte si elles s'effondrent.

 

Des sevices rendus

         
 
          Emprunter la nationale imprimer ses coudes au National accomplir son devoir national département éducation nationaliser ses devoirs accouder ses impressions au National s'impressionner de la Nation reprendre la nationale dans son petit département se sentir appartenant apparemment itinérant servir sa liberté en tant que participant participer à sa liberté se libérer le soir planté traverser les institutions comme autant d'appartements en égarer sa maison emprunter la nationale imprimer ses coudes au National...
  
  

jeudi 27 septembre 2012

Des accords d'importance

  
  
          Il ne faut pas s'y fier. Il y a une origine au fait de ne se sentir que peu concerné. Par ces tous et ces riens, à l'alentour, tout autour de l'extérieur, ainsi qu'aux contours de l'intérieur.
          Accorder de l'importance à tel ou tel élément plutôt qu'à un autre tient à la valeur qu'on apporte à cet élément. Ce dernier devient alors constitutif. Pour le moment, c'est simple.
          Cet élément peut, se doit même, très souvent, être courant, il n'en faut pas moins qu'il soit rare. Rare pour soi-même. On ne me fera pas croire que le docteur Wiesner eût apporté autant d'importance à ses six cents et quelques enfants, plus qu'à ceux de son foyer, s'il en eût. Oui, illustration facile.
          Pour accorder de l'importance à tel ou tel élément plutôt qu'à un autre, il faut qu'il soit rare. Sinon, il se noie dans la masse de nos habitudes, et n'est plus qu'un rouage.
          Nous sommes entourés de rouages, d'engrenages, roues dentelées. Nous sommes nous-mêmes une dent, un élément de cette mécanique, qui ne sommeille pas même lorsque nous marquons une pause dans le circuit quasi-perpétuel de notre section dans la machine.

          Ainsi, pour différencier les pièces des autres, celles qui nous permettent de nous mouvoir d'élans volontaires ou impulsés, nous leur accordons de l'importance. C'est-à-dire un sens.
          Ce sont celles qui nous mettent dos au mur. Ce sont celles qui nous font prendre du recul. Je veux dire, celles qui nous font prendre bien plus de recul que toutes celles dont on ne se sent que si peu, de loin, concerné.
          C'est pour cela que je ne me sens que peu concerné. Ne pas y prendre mal. Ce n'est pas comme si ça ne concernait que moi. Ce qui est sûr, c'est qu'il y a bien des choses, il y a bien des choses, auxquelles j'accorde de l'importance.
  
          Mais qui forcément ne sont pas celles des autres.
          Mais qui ne sont pas forcément celles des autres.
  
 

mercredi 26 septembre 2012

Des géographes entêtés

  
  
Tu pourras bien
cartographier
les traces tangibles
les tangos des rencontres
les contre-productibles
les déductions des actions
les axiomes traversés
les traverses empruntées
les emprunts embrumés
les embruns effacés
il reste l'impalpable
de la traction des palpitations
que tous les traits dessinés
ne sauraient représenter
  
  

De la cueillette : De ces petits points... de vue

 
  
Tant de gens pensent encore la difficulté ou le handicap de l'autre en terme de handicap posé à soi-même, plutôt que de les penser comme point de départ en terme d'ambition pour l'autre.

 

mardi 25 septembre 2012

De l'incorrection des cieux



Le ciel pisse au même
endroit qu'il se mire.
c'est dire si lui en est troublé,
A y regarder après,
il n'y voit que son reflet.

En propre ?
Qu'importe...

 

Des bon vouloir

 
 
Ils auraient voulu quelqu'un qui t'offre la lune et te paie le monde entier
Je ne peux que te faire voyager où l'on ne peut pas aller

Ils auraient voulu quelqu'un qui se porte droit et passe la semaine endimanché
J'ai beau relever mes manches, la chemise est tâchée

Ils auraient voulu quelqu'un qui sorte d'une argenterie bien dotée et un porte-feuille bien chargé
Je mange avec les doigts mais suis prêt à les partager

Ils auraient voulu quelqu'un qui cohorte des armées et salue les douaniers
J'entraîne des soldats déclassés à savoir causer et marcher

Ils auraient voulu quelqu'un qui conforte le foyer sans être à découvert
Je sors les mains nues comme des poches et le chef couvert

Ils auraient voulu que le sort ne soit qu'un enchantement
Je ne suis pas magicien, moins encore physicien
et la chimie de toi à moi ne se calcule pas

Et si les pieds de nos nuages se sont emmêlés
c'est bien parce qu'ensemble la mer ils ont goûté

C'est pour ça que nos larmes sont salées
et que là-bas elles iront s'échouer
 
  

lundi 24 septembre 2012

Des restes de quais



A l'insanité des quais
l'ombre des silhouettes
de ceux qui s'en vont
qui prennent le chemin
des routes maritimes
l'ombre des ventres
des oiseaux charognards
qui suivent les traînées
des coins des courants
il n'y a rien à chercher
dans le malsain des quais
que les ombres estompées
de ceux qui tournent dos
à celui qui fait le piquet
à celui dont il ne reste
que la bite pour s'accrocher
 
A la sainteté des quais
l'ombre des silhouettes
de ceux qui s'en viennent
d'avoir pris le chemin
des routes maritimes
l'ombre des ventres
des oiseaux charognards
qui ramassent les traînées
le long des courants
il n'y a rien à chercher
dans le sein des quais
que les ombres d'inconnus
des arrêtes sur le dos
des pieux de sel piqués
pour celui dont il ne reste
que la bite pour s'accrocher
  
  

Des sorties à la mer



de cette sortie à la mer
il ne reste que ce sable
qui apporte la trace amère
des tes pas sur cette plage
de cette sorte d'arrière
il ne reste que ce vent
qui transporte le rance d'hier
sur un horizon divergent
  
  

dimanche 23 septembre 2012

De la force des dernières

  
  
De cet effort d'abstraire,
nous en tirons une force,
changer l'or de tes fesses
comme si c'était la dernière
nous permet de te voir
comme si c'était la première...
  
 

Des lignes d'arrêt



bien sûr elles en auront coupés
bien sûr elles en couperont
des regards les lignes d'arrêt
des moments arrêtés à quais
il nous faudra bien garder
les coupures aux doigts
d'avoir caresser les oyats
et l'effort de conserver
d'avoir ainsi converser
avec de vagues éternités
  
  

samedi 22 septembre 2012

Des ailes déracinées



la nuit a déraciné ses ailes
de la lande
effrayée comme les perdrix
du coup de feu
du petit jour
envolée dans la nue
ne reste
qu'une brume soulevée
  
  

Ceux qui sortent de terre



On les dit à profil bien qu'ils se tiennent bien en face.
On médit le profit de les voir remplir tout l'espace.
Ils n'ont pas l'art dans les manières ni les manières de l'art,
c'est qu'ils doivent vivre dard-dard lardés des messages
d'un monde de modèles immondes dont on les inonde.
Ils n'ont pas eu tous les codes ni n'encodent tout l'abécédaire,
pour cause ils décodent sans logique, à marcher aux pieds des lettres.
Ils feraient perdre la boule avec leurs mille casquettes,
dont ils se parent pour parer les roulés-boulés
pour masquer les facettes grises et argentées
de leur bouille en bouillie estampillée d'étiquettes.
Ils n'ont jamais vu la mer, les pieds ancrés dans la terre,
ils n'ont que l'air de la cité dans laquelle ils sont cloisonnés
et respirent les cahiers, les bagnoles brûlés, et l'éther.
Ils aspirent à sentir le sel des beaux quartiers
et les parfums sucrés des grandes surfaces
où ils viennent chercher les griffes dégriffées
et racler sur les baies leurs visages baffés.
Ils ne s'arrêtent pas à la barrière,
ils soufflent sur les bronches et les frontières
et se taillent comme ils peuvent des murs
pour protéger du dehors leurs engelures.
Ils sont nés brut et sans coffre-fort,
dans un couffin rude où les fées ont oublié le réconfort,
sans rentrer plus dans les moules où les autres les placent.
Loin des cousins rouges, ils ne savent pas lever les bras,
ne connaissent pas les coussins du ciel mais la loi de l'étroit.

Les enfants de terre luttent peut-être à l'abstraction,
pourtant, il faut leur rendre, forcent l'attraction.
  
  

vendredi 21 septembre 2012

Eclaircissement domestique

   
 
Je t'apprendrai les yeux du ciel
à dormir les yeux ouverts
à tresser les crinières
à les dénouer sans regarder derrière
à effiler les couteaux, à enfiler tes sabots
à lacer tes poings dans les poches pour mieux les pocher
les noms des chiens et l’œil du loup
à bouffer les oiseaux et voler un peu plus haut
à planter les crocs dans les collines
à marcher dans les blés semés
à rouler les maïs et gagner les forêts
la mer et comme elle peut danser
à sauter dans le vent pour aller de biais
à connaître les quais et tendre des filets
à ronger les cordes et soigner les nœuds
à démettre les pieds des rochers, à y poser les tiens
tant que tu seras là, que tu ne leur appartiens pas
tant qu'ils ne te prendront pas, ne te donneront ton numéro
je t'apprendrai à chanter tout ce qui ne se dit pas
pendant que toi, toi, tu m'apprendras
que ça valait les coups
rien que pour ça
rien que pour toi
 
  

jeudi 20 septembre 2012

Des hérissons à la con

  
  
J'admire cet hérisson à la con
qui traîne son gras dans le jardin
quand il ne reste que les araignées
quand la meute des chiens va pisser
quand bien même tous sur son dos
effrayés plus que bravaches à la cogne
lui les tient en respect, les tient lointain
sans plus cou tendu et mot haut à aboyer
mais bien au fond de soi retiré immobile
il leur fait la plus belle nique sobre et entêtée
de leur offrir conscience de leur impuissance
  
  

mercredi 19 septembre 2012

De la cueillette : De la cause existentielle

 
 
Que l'on parle de toi
dans ton dos,
c'est reconnaître
ton existence ;
quand on parle de toi
en face de toi,
c'est là que t'es cuit...
 
 

mardi 18 septembre 2012

Des excessifs



Quand t'as bien bu déjà
qu'il n'est même pas tard
trop tard pour toi
que l'accroc est créé
que le croc a craqué
t'écumes sur le comptoir
tu cuves sur le trottoir
l'air te crache dessus
tu ne donnes plus l'air
ressers-moi

Quand t'as bien bu déjà
le noir des nuits blanches
trop tard pour toi
que le sel est craie des nerfs
que le craquement des eaux
l'écume de tes phares
sur ta déroute brouillée
le crachin est mâtin
tu ne prends plus d'air
ressers-moi

Quand t'as bien bu déjà
qu'il n'est même pas noyé
trop tard pour toi
que le rock des os rauques
que les basses raclent le fond
tu trempes tes artères
tes tempes te trompent
et ne cachent que le matin
tu ne reçois que les brasses
ressers-moi

Un verre de ta lumière
 
  

Calibrage : Publication FPDV

 
 
Publication ce jour dans la revue FPDV : Des excessifs


Texte lisible aussi ci-dessus
 

lundi 17 septembre 2012

Des tas


Chaque soir,
il remplissait
ses petits
sacs
de tas de
lumière,
qu'il laissait
sécher au
soleil.

Il pensait bien
qu'un de ces jours,
il en aurait
accumulé
assez
pour
endiguer
les flots portés
de la nuit.

Chaque soir,
il s'en retenait
de les éventrer,
ces tas de
sacs,
alors que
la nuit se
déversait
pour
l'emporter.

Il se jurait bien
qu'un de ces
jours,
il en suivrait le
cours
jusqu'au
bout,
se laissant 
couler.

En attendant,
il se retenait
aux bords de
l'aube,
appréhendant
la nouvelle
apnée des
idées
claires.
    
 

De la transpiration

 
 
Tu sens, tu sens

ça empire, ça transpire

le niais, l'envié, comme j'ai été élevé

ça transpire, ça transparaît

la culpabilité, comme j'ai été élevé



Tu sens, ça sent

ça transcrit, ça transvide

le trait, la ligne, comme je les ai décrits

ça transpire, ça transparaît

l'écriture, comme elle m'a élevé
  
  

dimanche 16 septembre 2012

Spéléologie extérieure

  
  
- Plutôt que de s'arrêter à l'écran de son intérieur
il avait décidé d'aller piétiner un peu de lumière
histoire d'éclairer un peu l'obscurité de ses pas -
  
 

De la cueillette : De la dentition

 
 
Ce qu'il y a de bien avec les casses-noix, c'est qu'ils finissent toujours par s'y casser les dents...
 
 

samedi 15 septembre 2012

Des madeleines

  
          Pour causer d'un souvenir qui nous réchauffe, nous attendrit, touche à notre kitsch intime, l'on reprend souvent cette image à présent ancrée dans la culture collective : celle des madeleines, de Proust. Sans bien même avoir lu l'ouvrage, l'expression  est rentrée dans le moule commun, après avoir été démoulée par son créateur.
          Elle ne va pas sans évoquer chez chacun une intimité réconfortante, transporter chacun en arrière avec la force d'un grand-huit. Bref, elle émeut, ou plutôt, ce qu'elle invoque chez nous émeut.
          Néanmoins, cette délicate image possède son pendant. Si l'on  se laisse si facilement projeter dans de doux souvenirs, il arrive aussi, lorsqu'on ne s'y attends pas, imprévu dans le fil, que le rasoir ripe et nous ramène aussi en remembrance bien moins alanguissante, mais tout aussi éloquente. Comme la réminiscence du goût d'un paquet de madeleines avariées...
          Alors remonte en bouche tout autant de sensations, de celles qu'on aurait aimé laissé dans la boîte à souvenirs, et qui laisse en bouche le sale goût d'affres subis ou causés, passés.
          Nous gardons précautionneusement tout un tas de boîtes de petits gâteaux, préférons ouvrir ceux qui craquent, croustillent, fondent. Mais on ne peut les séparer de ceux qui resteront rance ou amer. Ainsi en magasin, ne pas négliger les deux, ni déprécier l'un plus que l'autre, ils sont ce que nous avons posé sur l'étagère. Ils permettent de mieux apprécier ceux que nous nous cuisinons dans le présent, même si, parfois, il est dur d'effacer cette saveur de pourri d'antan.
  
 

vendredi 14 septembre 2012

De la cueillette : De l'embarras

 

A se débarrasser de choses et d'autres, ça finit toujours par embarrasser quelqu'un d'autre...
  
  

jeudi 13 septembre 2012

Le ciel a les mains sales



le ciel a jeté des étoiles de nuit sur la lumière du sable
il n'y avait que lui pour accepter ce sale boulot
question de munitions...
  
 

Des jeux de (co)quilles

 
 
          La coquille déroulait les contre-sens sur des kilomètres, tandis que les nœuds s'enroulaient à la file.
Faire machine arrière n'était pas son affaire, la coque roulait de travers, rien à faire.
          Elle avait beau courser la dérive du courant, quand on prend le large, ça ne s'oublie pas, de larguer les amarres d'avec la rive.

Rideau ! (ou voile...)
  
 

mercredi 12 septembre 2012

De la bave, et de ce qu'on en fait

  
  
          Dans ce qui bave, c'est d'abord la coulure d'une idée, de l'esprit, du rien, descendant par la main jusqu'à la page. Puis ça s'étire, comme une crasse compacte qui cherche dans son étalage un esthétisme qui s'allierait avec celui de l'idée. Qui salirait la virginité du vide, de la tranquillité.
          Dans ce qui bave de l'intérieur, d'entre le fruit de la vie, c'est une fermentation de sensations, un agglomérat d'affects qui s'importunent de considérations inconscientes ou idiotes et viennent gâter le fruit. De celles qui font que la mécanique sanguine ou sanguinolente tient de l'homme, et ne peut garder une propreté machinale.
          Tant que ça bave, ça trace, on se régale, on n'en est pas à essuyer les commissures. C'est quand le repas est fini, que les ennuis commencent. Rajouter une couche, un digestif. Apposer ses ratures comme des relents gastriques, pour que ça passe mieux. C'est comme remâcher ce que l'on vient de vomir. Histoire que les restes dans l'assiette continuent à ressembler au repas qu'on a sué à cuisiner, puis avaler.
          Parfois s'apercevoir que la bave a atteint toute la nappe. Mais rechigner à en changer, pour une nouvelle. C'est qu'on l'aimait bien, enfin, cette dernière. On avait fini par s'y habituer. Il y a les traces des orgies précédentes, des restes de pièces qui tiennent à cœur, des restes de haut-le-cœur. Alors commencer un nouveau carnet, suinter de nouveaux mots, salir de nouvelles pages si blanches...
          Et d'abord, cette bave, sèche dès lors qu'on a fini d'y mettre les doigts, qu'on l'a laissée reposer, paraît soudainement si étrangère. Vient-elle vraiment de soi ? Elle a pris, revendiqué son autonomie, champignon quasi indépendant du fruit. Ce n'est plus qu'un objet extérieur, externe à soi, ce produit qui venait de l'intérieur. En fin de compte, est-ce vraiment soi ? Est-elle si fidèle ? Mais fidèle à quoi ?
          Enfin, sans y chercher légitimité, affirmation d'existence ( quelle légitimité à la bave d'ailleurs, fors indications médicales ), qu'a-t-elle réellement à offrir aux regards ? Qu'une expiration de dégoût, l'expression d'une curiosité, l'inspiration d'un écho dans l’œil de l'autre, l'expiation d'un poids, d'une emphase toute personnelle. Que peut-on bien y voir ? C'est amorcer aussi une certaine séparation d'avec soi, que de donner à voir le dégueuli de soi, là, à terre, à l'autre, dans le danger de se le voir retourner avec répugnance, voire goguenardise.
          Oui, baver, c'est beaucoup comme écrire, ça comporte beaucoup d'inquiétudes. Puis à y regarder, baver, c'est vivre aussi, pleinement. Et vivre, c'est avoir des inquiétudes. Mais heureusement, pas que...
  
 

De l'obsèque carriériste

  
  
Quand j'entends parler du soin à prodiguer à la carrière, je ne peux m'empêcher de penser à celles des vaux des terres extérieures.

Aussi quand j'écoute, j'entends : " Prends soin de bien creuser ton trou ".
Ainsi entendant, je comprends : " Passer au mieux des décombres aux combles sans encombres ".

Un peu comme creuser sa tombe au plus près du ciel.
  
 

mardi 11 septembre 2012

De la moelle des morts

  
          Il traînait sa difformité informelle comme le corbeau le cadavre d'un lièvre. Obstinément, d'un qui-vive morbide d'entre les vagues de voitures.

A la limite d'être la proie de son fardeau.

          Il traînait sa pitance à cœur, comme la sanction de son existence. C'est bien cette danse-là, qu'il dansait chaque jour, extirper sa vie des extraits de mort.

 

samedi 8 septembre 2012

Des soirs au jardin

  
  
Sous la tonnelle
les fumées de la nuit
montent doucement
des lèvres demi-teintes
jusqu'à la toile
éclatée d'étoiles
monte doucement 
une musique emportée
  
sur la balancelle
les jambes étendues
esprit posé sur le bras
le treuil remonte
quelques mélopées
de l'obscurité
montent doucement
quelques cordes mesurées
 
doucement 
   
  

De la chasse

  
  
              Il n'est pas question d'une régulation de la prolifération des espèces. La chasse au temps se fait par les proies, et ne ramène pas de gibier. Uniquement la carcasse d'une journée qui pend au crochet, maigre. Uniquement le poids de ce qui n'a pas pu être accompli dans la besace, lourde. Multiplier le pain, le vin, les créneaux horaires, les démultiplications, les suées, les heures tardives. Se dire à l'étalage : c'est bien rempli, s'en satisfaire, pour en fin de compte compter les "mais". Alors en changeant même son fusil d'épaule, on tire, on tire à blanc, sur la corde, les mèches des chandelles. Pour chanceler. La chasse au temps vise le prédateur, qui gagne toujours. La course ne s'en arrête pas. La battue est simultanée. L'ouvrage abattu s'ouvre sur un autre, et un autre, comme autant de rayons de ces journées qui tournent. Saoulerie sans ivresse. Ce qu'il faut faire. Comme les premiers mois d'un nourrisson. C'est une course sans arrivée, où les maillons s'enchaînent. Pas de scie adaptée, pas de cisailles, de pinces pour sectionner, couper cette chaîne. Une course sans arrivée. Alors tu traines et tu galopes.

En joue...
  
   

Des barreaux


- le barreau ne peut empêcher le regard de se tordre -
 
 

jeudi 6 septembre 2012

Des pages qui tournent

  
  
- On ne peut tourner une page
sans y laisser une trace du gras du doigt,
sans y laisser un peu d'encre en soi. -
 
 

mercredi 5 septembre 2012

Des avortons

 
 
il y avait des mots qui se suivaient, d'où naissaient des idées,
plus ou moins adhérents, en unités cohérentes de sens
mais toujours, toujours, inachevées, à remanier
ce qu'il n'y avait plus, c'était le temps au mortier de prendre,
la magie chez le laborieux monteur de faire surbrillance.
ils arriveront, tôt ou tard, à quelques fenêtres,
pour peu que le temps dissolu se laisse un peu concentrer.
elles arriveront, les arrachées poétiques,
du drame temporel dont l’encéphale est victime et acteur.
toujours, tôt ou tard, un tant soit peu,
faire tâche dans l’œil de celui qui viendra s'y salir.
faire dans l'esprit d'un autre naître un écho d'idée, de sensation,
faire un avorton d'un autre dans l'esprit d'un autre
avant de retourner au rien d'où il vient.
  
  

mardi 4 septembre 2012

Du diaphane

  
   
A hanter, errer dans l'alentour de l'autre,
nous ne faisons qu'errer autour de nous-même,
à se faire fantôme de l'autre, de ses traces,
nous ne faisons que devenir l'ombre d'un nous-même
qui nous gêne de n'être plus avec,
d'un nous-même qui peu à peu s'efface
sous l'image de cet autre qui ne se voit pas,
qui ne nous voit plus

 

lundi 3 septembre 2012

Des jours de rentrée

 
  
Mes condoléances à ces vacances
Mes amitiés à ceux que je n'ai
pas eu beaucoup le temps de croiser
Mes courages à ceux qui reprennent
Mes forces à ceux que j'aime
Mes envies à ceux qui continuent à glander
Mon doigt à ceux qui vont m'emmerder
à défaut de mains dans la gueule
Mes mots à ceux qui voudront bien les lire
et pourquoi pas les partager
Mon verre pour cette fin d'été
Son petit frère pour l'automne
Et mon grain à tous les tarés...

Allez, à tantôt mes gins !
  
  

dimanche 2 septembre 2012

Des bradeux

  
Ça commence toujours par une odeur de déodorant bon marché, d'un agglutinement au corps à corps, dans un tangage réchauffé. Et déjà la montée d'une certaine exultation, entre les maugrées de l'organisation de la SNCF. Premiers effets sardines dans l'exhumation des  tournées précédentes.
Puis c'est le lancement, tous s'élancent à la sortie du quai s'accoler aux autres dénicheurs itinérants, le nez à chercher les bonnes affaires, et éviter celles des transpirations acres. Regards avides et pas hagards, d'entre les hautes, si hautes façades de pierre grise et de briques. Poussées de coudes, de cordes vocales, ventes à la criée de moules et d'improbables, multiplication des clichés dans la soustraction des pieds. Mais à part le touriste monté spécialement pour le folklore, peu y prennent garde, au tableau. Plutôt garde aux sacs et cabas qui s'emplissent tant que les poches se vident.
A qui de s'extasier devant les trésors antiques, les souvenirs caustiques, la résurgence spasmodique des vieilleries déterrées, et des nouveautés branchées.
Ça finit toujours par une addition. Celles des aisselles, de la pisse et la bière, dans les rues pavées et les wagons distendus d'être repus. Et ce petit ballon orange rempli d'hélium, qui tangue au plafond, solidement et transitoirement amarré à l'exploit d'une poussette réchappée.
C'est toujours une aventure, même si ce n'est plus la première, ça reste pour le bradeux une première division de rentrée. La génération d'un partage intime et généreux.
  
 

samedi 1 septembre 2012

Des échos nocturnes

 
  
- Entre les tempes du matin résonnent les spasmes des réveils de la nuit, tandis que là-bas, dans la rosée luisante, le foin encore attendri reste couché. -