Des fossiles

 

Tout ce dépôt

qui se sédimente

cimente le poids de soi

certaines strates

plus épaisses plus blanches

mais aucune appétence

à les entamer

sentir le rugueux relief

des coquilles pleines

certains souvenirs

encombrent

les vitrines

 

Des rêves à genoux

 

chaque nuit

il dessine

les plans des meubles

où il rangerait

le désordre des jours

l'encombre des heurts

où il ne cognerait plus

les genoux du bonheur

aux angles

chaque matin

se torche avec

le brouillon

 

Poésie chronique ton cas

Où Patrice Maltaverne parle du Cas Leleu :

 Poésie chronique ta malle

mes sincères mercis, et amitiés



 

Des parts

 

tout ceci ne fonctionne

que par sa dérision

l'important est là

 

Pourriture, mon amour

 

la cellule anthropophage

naissant de la petite mort

la barbe irisée blanche

arrimée à la dépression

elle est

ce qu'il y a de plus léger

dans cette putréfaction

du temps

 

Des fonds de tiroirs

 

il a parfois l'euphorie mystificatrice de faire une trouvaille

mais il ne court plus au devant des grands leur brandir

devant les yeux sa breloque au bidule qui pendouille

plus depuis qu'il est grand aussi

il sait maintenant qu'ils en ont tous plein le fond des tiroirs

coincées entre un vieux rêve et deux piles R5 supposées usagées

 

Cavaliers rouges

 

la plaine intérieure est comme une paume plate de la terre

une paume noire d'avoir été tant tapée battue à blanc des industries

le ciel souffle continuellement pour en couper la brûlure froide

une paume aux ongles vernis de tessons verts

dessus des rides d'arbres révérencieux

dedans les callosités stratifiées des terrils

les capillaires les rus courant les marais

les lignes sanguines et saillantes les cavaliers de schiste

n'y soutenant plus la circulation des wagons houillers

mais l'émoi de flaques sales des nues

et les baisers encollés des plantes de pied

la plaine intérieure est une paume tenant l'être au creux

tout en l'expirant d'un nord de ses lèvres

 

Pour 1 heure 2 heures après 36 heures de flotte

 

je marche sur les chemins bleus

évitant de troubler

les pièces de ciel

éparses

ils n'ont plus rien

de cavaliers

pluie au pas

lune pleine

et terre saoule

les chairs flottent

Des négligeances

une barbe de trois jours, c'est un homme qui se néglige

une barbe de trois mois, c'est un homme qui se rappelle

 

Du monde papetier

 

quand il a un peu d'argent,

il achète des livres, ou du bois,

quand il n'en a pas,

il va se promener en forêt

il s'y reconstitue

les copeaux de la terre

et les rognures

de l'homme

 

Des mouches et du vinaigre

 

Il chassait les idées noires

comme les mouches vertes et bleues

- avec du vinaigre -

il n'attrapait rien

pas même le cafard

se faisant

l'articulation de ses pensées

se détartraient

et l'odeur aigre acidifiait

la perception

 

Des bonnes pommes

tu es là toi

dans la saccade

de la pomme

dans le saccage

de la paume

tu es là toi

dans la guerre de moi

contre moi

et tu prends

ma pomme

et son carnage

dans ta paume

 

Des fruits de la dépression

 

il cueille chaque jour

les fruits de sa dépression

de préférence quand ils sont trop mûrs

qu'ils laissent un peu de poudre

sur les lèvres les doigts

qu'ils apportent un peu

de bleu de vert

goûtent un trop de sucre

comme ces grappes

à la fin d'un septembre

 

En vrac

 

Notes d'hier pour aujourd'hui

Il voulait écrire

mais ne savait finalement

entre trop et trop peu

dans les phrases

il fit autre chose

Plus tard

Se rend compte

qu'il écrit mieux

quand il n'écrit pas

bricoler ou lire

titre de recueil en cours :

Petit Traité à l'Usage de Ceux qui

Veulent Réussir à Rater Correctement

De la cueillette : Des positions

- Certains vivent pour ou par le travail

il ne souhaitait pas être séparé de lui-même

par une préposition

il voulait simplement que le travail le fasse vivre -

Des phénomènes gazeux

le brouillard c'est pas les vaps

les lèvres et les yeux posés

sur un nuage de lait

le crayon est nyctalope

dans la brûlure

 

De la petite panique

 

l'araignée qui te regarde de ses globes nue dans ta baignoire
le bouton de porte qu'on touche tourne le sang qui en orbite
le miroir au teint pâle qui se dore parce que c'est une fenêtre
la mèche qui t'ébrèche le front lèche tracasse tes cils ta joue
le mégot que tu mords qui torréfie tortille cette même mèche
le vent qui levé bandant charge sa dépression contre ta cuisse
le pinson qui sous le pied s'envole soulève ton bras au visage
je suis l'invisible l'insensible le silencieux la cinémathèque le
cinéma la cinétique l'épidermique la petite panique cette douce
tachycardie qui se serre et se consacre au fond de toi

 

Des lèvres

 

La pluie a remonté la terre dessus les graviers

l'écart des cuisses à muqueuse brune humide

le cavalier au crissement rouge s'est déréglé

                                                                                    ses lèvres entravent

les lèvres lapent les gravats                                           le vent à trois

les lèvres ravalent les pas                                              degrés boivent

- crédit                                                                        aux goulots étroits
- acompte                                                                    des étoiles

les lèvres brunes de la terre                                           sucent le froid

                                                                                    s'abreuvent s'abrègent

La pluie a remonté la terre dessus les graviers

succession des succions des muqueuses brunes

le cavalier voltige entre les talus le haut voltage

                                                                                   ses lèvres entravent

les lèvres avalent les gravats                                         le mégot à dix

les lèvres absorbent les pas                                          virgule boivent

- schiste                                                                       aux goulots étroits

- shit                                                                            des lignes noires

les lèvres brunes de la terre                                          s'abreuvent s’ébrèchent

                                                                                  clôture du compte

d'un baiser sur

les lèvres brunes de la terre