samedi 9 mars 2013

De l'assise des fondements



Vois-tu, j'y pensais depuis quelques jours. J'avais bien compris l'injonction, mais avais bien du mal à y répondre. C'est que je suis d'une nature un peu lente. Il faut toujours un certain temps d'intériorisation. A ressasser, ça s'est enfin éclairé, en travaillant une photographie. Ça semble facile, parfois, écrire. Ou non, justement. A écrire régulièrement, depuis certes peu, je reste impressionné par ceux qui trouve le bon mot, jour après jour. Je dois trucher, pour ma part, pour être honnête. Quand rien ne vient, ce qui arrive assez souvent, quand l'image mentale ne s'impose pas d'elle-même, je cherche à l'extérieur, dans les vues glanées ci et là.
Et ce matin, j'ai ouvert cette photographie d'arbre, ce détail de tronc pris pendant le grand froid, dont la couleur m'avais frappé. Je la passe en niveaux de gris, et contemple, espérant le déclic. Ça a toujours été un motif important, l'arbre. Il figure d'ailleurs dans le premier texte de ma remise en route. Ainsi je contemple, et rien. Alors trêve. Il ne sert à rien de creuser le vide, s'il ne soulève ni poussières, ni matière à.
Puis l'article lu au matin sur la poésie et les poètes d'aujourd'hui m'est revenu à l'esprit. Avec ce court entretien où l'on m'invitait à proposer des textes pour défendre « ma poésie ». Et tout s'est mis en place. J'ai compris pourquoi j'avais eu temps de mal à trouver quoi en dire, à trouver quoi proposer. J'ai compris pourquoi, si on me le demandait, j'aurai tant de mal à parler de « ma poésie », comme j'ai tant de mal à me considérer « poète ». Alors quand il s'agit de défendre « ma poésie »...
C'est elle qui est une peau, comme le lichen au tronc de l'arbre. Comme elle est aussi un composant de la sève. Qu'entre autres mousses, elle me colore, autorise des nuances. Un cardinal additionnel. Un Nord nécessaire. Tout comme la mer. Celle d'en haut. Celle qui porte le bleu, le vrai, je veux dire. Celui qui ressemble aux bleus des corps, avec ses colorations changeantes. Bref, celle qui porte des bleus qui ont toutes les couleurs, sauf le bleu.
Je veux bien admettre être auteur, comme l'auteur d'une lettre, d'un courrier. Ce ne sont que des courriers, que j'écris. Expéditeur, l'instinct, la viscère ; destinataire, l'inconnu, le miséricordieux, le curieux. Il me faut bien le reconnaître, j'ai repris l'écriture comme elle m'a repris. Elle était nécessaire, impérieuse. Il était nécessaire de réajuster les cadrans, de rééquilibrer les câbles, pour reprendre la large. Oser reprendre le large. Il me faut bien le reconnaître, abstraction toute faite des contingences de qualité ou d'intérêt pour l'autre, la poésie est viscérale. C'est elle qui me défend, et qui pour une part, permet d'être. Peut-être un jour serai-je assez grand pour m'émanciper, alors peut-être serai-je capable de la défendre à mon tour.


 

2 commentaires:

  1. Mais tu l'as bien défendue ici !
    A petits pas jour après jour
    ça grandit, ça se met en place
    ça se fout en l'air
    et ça repart
    rien ne presse,
    il faut du temps pour apprendre à marcher ;)

    RépondreSupprimer
  2. A petits pas jour après jour
    ça grandit, ça se met en place
    jusqu'à ce qu'il prenne son envol
    ce faisant, m'abandonne
    et abandonne la main


    merci Christine

    RépondreSupprimer