Vois-tu, j'y pensais
depuis quelques jours. J'avais bien compris l'injonction, mais avais
bien du mal à y répondre. C'est que je suis d'une nature un peu lente.
Il faut toujours un certain temps d'intériorisation. A ressasser, ça
s'est enfin éclairé, en travaillant une photographie. Ça semble
facile, parfois, écrire. Ou non, justement. A écrire régulièrement,
depuis certes peu, je reste impressionné par ceux qui trouve le bon
mot, jour après jour. Je dois trucher, pour ma part, pour être
honnête. Quand rien ne vient, ce qui arrive assez souvent, quand
l'image mentale ne s'impose pas d'elle-même, je cherche à
l'extérieur, dans les vues glanées ci et là.
Et ce matin, j'ai ouvert
cette photographie d'arbre, ce détail de tronc pris pendant le grand
froid, dont la couleur m'avais frappé. Je la passe en niveaux de
gris, et contemple, espérant le déclic. Ça a toujours été un
motif important, l'arbre. Il figure d'ailleurs dans le premier texte
de ma remise en route. Ainsi je contemple, et rien. Alors trêve. Il
ne sert à rien de creuser le vide, s'il ne soulève ni poussières,
ni matière à.
Puis l'article lu au
matin sur la poésie et les poètes d'aujourd'hui m'est revenu à
l'esprit. Avec ce court entretien où l'on m'invitait à proposer des
textes pour défendre « ma poésie ». Et tout s'est mis
en place. J'ai compris pourquoi j'avais eu temps de mal à trouver
quoi en dire, à trouver quoi proposer. J'ai compris pourquoi, si on
me le demandait, j'aurai tant de mal à parler de « ma
poésie », comme j'ai tant de mal à me considérer « poète ».
Alors quand il s'agit de défendre « ma poésie »...
C'est elle qui est une
peau, comme le lichen au tronc de l'arbre. Comme elle est aussi un
composant de la sève. Qu'entre autres mousses, elle me colore,
autorise des nuances. Un cardinal additionnel. Un Nord nécessaire.
Tout comme la mer. Celle d'en haut. Celle qui porte le bleu, le vrai,
je veux dire. Celui qui ressemble aux bleus des corps, avec ses
colorations changeantes. Bref, celle qui porte des bleus qui ont
toutes les couleurs, sauf le bleu.
Je veux bien admettre
être auteur, comme l'auteur d'une lettre, d'un courrier. Ce ne sont
que des courriers, que j'écris. Expéditeur, l'instinct, la
viscère ; destinataire, l'inconnu, le miséricordieux, le
curieux. Il me faut bien le reconnaître, j'ai repris l'écriture
comme elle m'a repris. Elle était nécessaire, impérieuse. Il était
nécessaire de réajuster les cadrans, de rééquilibrer les câbles,
pour reprendre la large. Oser reprendre le large. Il me faut bien le
reconnaître, abstraction toute faite des contingences de qualité ou
d'intérêt pour l'autre, la poésie est viscérale. C'est elle qui
me défend, et qui pour une part, permet d'être. Peut-être un jour
serai-je assez grand pour m'émanciper, alors peut-être serai-je
capable de la défendre à mon tour.
Mais tu l'as bien défendue ici !
RépondreSupprimerA petits pas jour après jour
ça grandit, ça se met en place
ça se fout en l'air
et ça repart
rien ne presse,
il faut du temps pour apprendre à marcher ;)
A petits pas jour après jour
RépondreSupprimerça grandit, ça se met en place
jusqu'à ce qu'il prenne son envol
ce faisant, m'abandonne
et abandonne la main
merci Christine