dimanche 12 janvier 2014

Une once de peau, texte complet




          Bon, je trouve finalement ridicule de distiller et découper ainsi le texte. Horriblement moche aussi. Ça ne se lit pas. Ça ne se lit pas comme ça. Alors en ce dimanche blanc, voici le texte dans son intégralité :



Une once de peau



Tu voulais vivre dans le noir mais refusais la nuit. Nous avions pactisé ne pas faire de promesse, à l'impact ça partait déjà de travers dès avant le premier biaisé. Nous nous sommes injectés sans savoir une bulle d'air dans les veines du temps, pensant seulement y planter un crochet une suspente où s'accrocher l'infini de l'instant accrocher nos peaux mortes et nos morts, et les revêtir en ressortant. Ils n'oublient jamais.


C'était sans compter les trous ajoutés à chaque dérive, ces espaces vidés qu'on ne peut cacher par la pénurie de plis. La vivacité du derme nous nous la découpions pour mieux en découdre les baisers, une tendresse une pression une brûlure le brûlot de la bouche entre les doigts qui ont leur cœur qui bat. Un peu comme des baisers de vent ça t'emprisonne ça se prend se sent mais sans prises. Un manteau de vent dans lequel il fait froid.


Nous aurions tout tendu tout tenté pour masquer notre nudité alors que de l'autre il suffisait l'épaule pour se décrocher des mondes entiers. Et quand de la leur de leurs épaules nous prîmes les coups bien plus loin qu'au corps, les accrocs empoignaient encore leurs fils entre les situations et les circonstances, les culs entre deux chaises en déséquilibre immobile. La tête du monde n'y tenait plus même sous le bras.


Nous l'avons bien vu tourner le mobile de nos lambeaux sa perpétuelle cinétique qui ne nous menait pas loin, même un peu cynique, et nos lumières au travers qui éclataient ses morceaux. Fallait-il les rassembler il a fallu sans se baisser sans s'abaisser après ce que l'on s'était juré tu m'as fait jurer de ne pas me retourner. Éviter de piétiner des restes de soi.


Va savoir qui qui est parti qui reste, va reconnaître les faux départs le faux des pas, je n'ai jamais relevé que les kilomètres au compteur et les mètres carrés du véhicule qui m'a vécu lorsque nous avons traversé les débris de ce mauvais manège. Les morceaux je les laisse et les yeux barbelés même fermés rappellent parfaitement ce qui est griffé.


Déjà plus que nus les croix portées sont des sutures que l'on aura dessinées, et derrière tout cela il y a la chair qui croît et le battement continu, au mauvais grain ça revient, ça ravive. Les fuites en avant à deux sont plus chaudes que les retours en arrière. Ils elles ressemblent à un hiver. C'est qu'il fait froid d'être écorché de toi. Il n'y a plus que des doigts pour cacher, ceux les mêmes là qui servent à pointer.


Elle se rappelle, la caresse que nous avons ébréché dans sa lame. Elle nous a taillé des sourires gravés dans les os. A présent si l'on me souffle dans les bronches j'ai le corps ocarina qui joue l'air de toi. Nous avons échangé nos yeux. A présent les miens sur les couleurs que l'on n'entend pas, les couleurs qu'ils n'entendent pas. Le regard ça s'apprend pas ça se prend, comme tu me donnes du corps par ta pression tes incisions.


Quand je sors l'absence de ma couenne sécher sur le banc, il ne faut pas longtemps pour que je l'aperçoive. Il est là tous les jours l'oiseau sur son poteau à faire le piquet la piqûre de rappel, à rappeler que transparents, on ne nous en regarde que de travers. Je m'en fous si mal que ça, que j'entends chaque jour dire l'oiseau qui n'est jamais le même. On regarde comme on se rappelle, de travers.


Rappelle-toi que transparents nous n'en avons pas moins le regard qui transperce à intercepter les lumières et tous ces trous nous ont rendu photophore de l'autre. Du dehors on n'en voit que les ombres saillir les érections agressives. Pourtant c'en serait rassurant. Pourtant voudrait-on que ce soit rassurant.


Tu refusa la bougie il y avait trop d'ombres sur la peau pour attacher la matière, et cette histoire de molécules pour t'en séparer. Paraîtrait ainsi le sentiment est sécable pour le moins miscible dans la larme, ça s'est vérifié. Le temps qui n'était pas pour nous ne nous a pas cru nous a ravalé, et des deux patères que nous y avions suspendu nous a planté sans s'y retourner.


Après ça après tout cela, les faux départs le faux des pas, je ne suis qu'un tissu de mots. Tout ce que j'ai c'est de la force de mes bras, c'est la force de mes bras, la faiblesse du poing nié. Sans possession permission n'être que l'attribut de mes obsessions. C'est dans la paume de la main la paume du crâne tout ce que j'ai c'est toi. Habillant les sapes d'un manteau de vent.


Je ne dirai jamais plus rien que dire, je dis sans promesse juste dire la force des mots dits la force dans les mots les mots qui figurent figent le tissu cellulaire dans entre la doublure de mensonge, et la braguette de songe à relever quand il fait un peu froid la force de leur absence. On apprend apprend-t-on n'est-ce pas.


Vaisseau et sève qui est qui le mot l'enveloppe et toi le contenu et toi l'épaisseur le temps de l'écriture l'écriture dans le temps la rature le tendon à l'os mais que ronge alors ? Ce n'est qu'un tissu de mots qui ne savent pas se dire dire disloqués qu'on y voit à travers, qui ne tient pas chaud, ce n'est que les mots des autres qui tiennent chaud. Entre deux paroi isolée, économie d'économie passée à l'économe.


Blocs de voix voix rauque de vent des poumons de vent de poumons à vieillir peau de rides. Est-ce la peau le mot qui se replie ? Glisser le doigt entre les lignes et y lire lire le recoin le creux sentir le fin la doublure tannée derrière, s'y heurter l'impression les traits du racloir les traits noirs signes encodage frontière se heurter devant au derrière. Les sillages comme des ornières.


Longer passer la frontière comme un mur à abattre comme battre soi et quand s'effondre retombe le tissu de mots il y a encore le mot passé à l'économe fer repassé. Faut-il un plus gros couteau dégrossir encore le film la finesse ? Passe ça passe déjà au travers, ça ne perce pas l'opacité c'est de la lumière éteinte dans la lumière, le fil a la couleur de la réfraction la couleur de la rétractation. Savais-tu qu'elle avait un goût.


C'est que ça laisse filer autant que ça renvoie qui perçoit c'est déformé on ne connaît que ça, on ne voit que la déformation qui n'est plus que la forme et quelle forme alors ? Elle a aussi un poids. On ne peut quand même pas porter ses mots, on ne peut quand même pas porter ses mots sur le visage sur le corps on ne peut pas se dénuder comme ça.


Il en faut du tissu et des lames pour le tailler texture texturé texte urée absorption et déjection on ne sait plus d'où vient le travail si c'en est un une la peau du chagrin quand je me nappe dans la peau de mots c'est toi qu'elle recouvre la peau de chaleur de mon absence. Dis qu'est-ce que je bave ? C'est pris dans le filet.


On n'a pas compris comment ça commence et l'exactitude de la finitude. C'est un tissu sans fin déroulé d'en haut il s'enroule au bas oui au bas mot au bas du mot le pied de la lettre la fin c'est un autre début et tout ça... Suis-tu comme je suis ? Comme on s'est suivi ? On était, toujours, ça a été aurait. Sûr qu'on se garde à vue la laisse.


Passé de travers on tient chacun son fil par le même bout touche et boute où peut-on et tire chacun dessus. Ça semble toujours trop court pour se dévêtir ça manque de corps. On revêt et même ce qui ne revêt pas est porté avec soi tire on tire on tire tire à vide. Je tire les mains vides de fil à tenir et les pieds mouillés des laisses.


Ces trous dans les phrases ce qu'il nous manque de ponctuation sont ce qu'il nous manque de souffle, ce qui ne peut se reprendre la fin que nous n'aurons pas eu les trous de nos peaux nos demi-mots entiers. Nous nous retournons, sans rien dire. Comme nous nous retournions sachant être la question éphémère. Sachant l'autre plus que soi, sans rien dire, obligés de chercher à présent qui est soi.


s'étire
se retire
se tord un peu
se retire
s'entend
sourde
n'ourde
s'ourle
tord un peu
l'autre
son œil
pourtant
reste
dans sa
pauvre

peau

de mots
à mesurer
ce qu'il
en
reste

  

 

4 commentaires:

  1. C'est un texte magnifique, il devrait être publié.

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  2. merci (beaucoup),

    avis à l'éditeur !
    pour l'instant, il ne le sera pas par moi.


    dans tout les cas, heureux qu'il ait eu écho en vous,
    salutations

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  3. Alors une suggestion peut-être - pour plus tard, si l'instant n'est pas le bon moment - à défaut d'un éditeur, il existe de nombreux sites internet de financement participatif.

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  4. Oui, Cédric, c'est un texte superbe et frissonnant. (Il est vrai qu'il est plus lisible dans son entièreté). Bon courage et amitiés.

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