vendredi 3 mai 2013

De l'intérieur # 1


 Mai là, rien. Il manquait à ses « obligations ». De celles qu'on se crée, comme les besoins. Qui installées, nécessitent. A moins que. C'est selon. Selon où l'on place l'hygiène, l'équilibre interne. Et elles lui manquaient aussi. Quant à y quantifier une échelle d'un côté ou l'autre du versant, il en aurait été incapable. Et quel concours d'ailleurs ? Les deux concouraient vers un même point.

Ça semblait si facile avant. Semblait, ne l'était pas tant. Tant, encore une masse, un poids. Qui pèse. Avant quoi, aussi ? Chut, pas de réponse. Écoute. Non, rien. Il manque, mange, déguste, à petits feux les pots, rempote, brûle. Des tas de départs avortés, oubliés, noyés dans le siphon de la douche. C'est qu'elle est passée, l'heure de prédilection. Entre le café et le clope, pendant le café et le clope, avant la douche où tout part. Si ce ne s'est écrit. Des tas de départs arrêtés. Quand il n'y a pas le flot, le flux, l'épanchement, l'épandage quoi. Le fumier fertile. Mais un fil de maille qui passe, traîne jusqu'à dépasser du crâne et sur lequel il n'y a plus qu'à tirer pour dérouler le reste. Ou presque. A peu près. A peu de choses, ou de lignes près. Écrire comme tirer le fil, ou s'y faire mener, suivre. Faire semblant de s'en contenter. Jusqu'à ce qu'il rompt et que le texte s'achève. Se clôt et les yeux avec dessus.


Départ de bon heur, mais un peu tard. Un autre. Salon du livre, un vrai. Ça commençait à remonter. Nous serons en retard. Avec de la chance, nous pourrons prendre la lecture en cours. Route et place plus rapide, finalement. Retard quand même. Zut. Enfin non, ça n'a pas commencé. Les sorties de table, ici et là-bas, ça traîne, et c'est bien. Nous n'avons rien rater. Saluts. Ça fait plaisir. Il se souvient. Je suis content. Présentation. Ma femme. Et la lecture à suivre. Installation : café, prise de place, prise de parole. Lucien d'abord. Je retrouve les intonations du mois précédent. Ça s'entrechoquent. Les mots. On y est. Nouveau départ. En bus. Direction Sénégal. Et les sons résonnent jusque dans les fanfares et le brouhaha de la rue. Superposition. Aspiration. A la fois ici et là-bas. Tout de suite et avant. La narration déroule une fourmilière de sensations, entraperçus. C'est ça, ça fourmille. Comme dans la rue. Où humains fourmillent entre des termitières de livres. Des piles, des colonnes, des lignes, des chevauchements soubassements, tasseaux linteaux. Des maisons de pensées d'autres. Des demeures de mots. Anciens et moins, neufs ou recyclés. Et entre ces termitières les touristes fouinent, s'extasient, se retournent, se détournent, pointent et parfois tirent. La tête d'épingle pour se l'entrer plus tard dans leur propre tête. Comme le récit de Lucien qui pénètre. Puis Dominique. Qui se meut peu à peu, qui se mue tandis qu'il avance plus avant, qu'il devance quasiment du corps la parole sur laquelle il s'incline, scande. Transporte l'auditeur en Afrique. Ou l'inverse. Non, dans le bon sens, à rester humble. C'est bien un dépaysement. Il faut faire l'effort du déplacement. L'effort de se placer, et de sentir le déplacement des lecteurs. Auteurs. Partager vraiment. Un peu. Puis retour à Lucien. L'heure se referme. Le beffroi rappelle la temporalité nordiste. Dernières touches pour la vision d'ensemble par les digressions, les précisions, le retour, encore pour eux, sur l’anecdote. Le vivant. Puis le temps aux autres voix, qui parlent habituellement noir sur blanc. Qui parlent couchées sur des pages. Avec là des visages en plus.

Il fait bon, et le soleil sourit aussi. Les fourmis circulent à petits pas, en files indiennes. S'entrelacent tandis que chacune poursuit néanmoins sa propre route. D'apparence. Elles se défont parfois aussi spontanément qu'elles se reforment ailleurs. Parfois elles s'agglutinent en plus de se coller. Les premières sûres de la bonne proie, ceux derrière, l'espérant. On entend encore le concert, derrière l'hôtel de ville. Un autre groupe. Tonalités différentes. Électricité dissimilaire. Électricité quand même. Nous passons du journal de bord à notre propre voyage. Lucien m'a dit « je serai dans ce coin du chapiteau, là », en pointant. « A tout à l'heure sûrement. ». Tabac. Chapiteau. Chaleur. Un peu de touffeur africaine, en somme. A droite, à gauche. Déroulement de stands. Des piles, des colonnes, des lignes, des chevauchements soubassements, tasseaux linteaux. Des maisons de pensées d'autres. Des demeures à mots. A gauche, à droite. Non, tout droit. Engouffrement indien. A travers les différentes cités, les différents pays. Premiers mots. Seconds mots. Rendez-vous à prendre. La poésie a ses maisons officielles. Tiens, c'est juste à côté. Le chien connaît déjà d'ailleurs. Il y a pissé sur le grillage cet hiver. Et dans la neige. Tandis que j'hésitais. Passe, passe pas. Plus tard. Juste une remise à plus tard. Quand je serai plus vieux de quelques mois. Un peu plus mûr. Apte non pas à être cueilli, mais à cueillir. Coïncidence, ironie. Quitter la mer, se retrouver à deux pas, à deux bois et trois marais de la Maison de la Poésie. Et ce qu'il y a entre les deux. On reprend. Coïncidence, la même tunnel rassemble les pépites. Y'a plus qu'à. Faire le pas. Non, elle est partie se promener. « Ce n'est pas grave, nous repassons ensuite ». Sourires. Sourires. Un peu l'effet d'une transfiguration en midinette. Pourtant les cheveux ne sont pas encore assez long pour autant boucler. Pas encore. Juste la prime voûte de la clef. Bref. Braquage. Une première fois. Une seconde. Apostrophe d'un auteur à notre niveau. Seul. Il ose. Nous respectons. Nous écoutons. Presque une défense. Cela se sent. J'ai envie de lui dire « Pas besoin, raconte juste ». Il n'y a pas d'attaque d'indifférence. Nous ouvrons. Et ça parle. Imprévu. Une aiguille. Un appétit déguisé. Un voyage Africain sur les traces de Rimbaud.


 

4 commentaires:

  1. Très belle observation....ça rue , ça bouge, ça fourmille et les pensées se faufilent. J'aime beaucoup !

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  2. Merci !
    Nous nous demandions si cela percerait, a-priori, oui, donc tant mieux !

    la suite et fin, demain...

    La belle journée !

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  3. Aller écouter
    c'est un peu comme
    oter ses chaussures à l'approche du sommet
    vider sa tête des petits cailloux
    et en rester là à prendre, ami,
    tout ce qui restera
    de tant de mots

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    1. un peu aussi,
      nus tête et pieds
      écouter le son propre
      de la terre et la pierre
      parler de leur voix
      faire taire l'intérieur
      et laisser trouver l'écho
      en dedans de l'extérieur

      à prendre oui,
      apprendre
      - ad prendre -

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