jeudi 31 janvier 2013

De ces mouvements, version définitive




  
           Je voulais causer de ceux qui croisent la mer pour la première fois, et de ceux qui à la fréquenter ne la voient plus. J'avais cette idée du va et du vient, de ceux qui vont et viennent, et pensent qu'elle n'est que cela, un va et vient. Qu'ils ne la voient que comme cette grande étendue rendue à la lune, à son attraction. Qu'ils ne s'en émerveillent qu'au premier regard, et la maudissent d'y être confrontés chaque jour au front, en front, avec sa respiration entêtante, tempêtante. J'avais cette idée que cet élan latéral n'est pas que cela, et que la vision que l'on en a change avec le temps, qu'il y a une sorte de spirale ascendante, où ce mouvement a-priori linéaire ne l'était pas, mais bien que chaque jour en apporte un quelque chose, un sentiment de plus. Je me suis aperçu qu'il en était de même avec la terre. Je veux dire, la terre que l'on travaille. Que ces travaux des champs se répètent, chaque saison, le labour, le semis, la pousse, la récolte, le labour, le semis, la pousse, la récolte, le labour... Comme la mer laboure à chaque montée, sème ses doigts dans le sable, le pousse et ses murmures, puis se retire laisser à l'homme gagner du pied et de l’œil l'estran et sa frontière.
           Cette idée comme la mer et comme la terre a germé longtemps, jusqu'à ce que je comprenne que le rapport que l'on en avait était un rapport d'amour, qu'il y avait dans ce mouvement apparemment binaire autre chose qu'une mécanique. Le premier franchissement est celui du cycle, où l'on accorde au mouvement une circularité, qui poursuit néanmoins ce rapport sur le plan horizontal. Celui-là a acquis ce qu'il devait mais n'a pas pénétré encore le sentiment et son être. Il n'y a plus qu'un pas. Et une persévérance. L'amour diffère lui aussi dans le temps, sa forme meut en même temps qu'il va et vient, et chaque retour apporte un peu plus. Certes il ressemble à ce qu'il était mais n'est plus le même, comme la mer et la terre à l'achèvement du cycle. Et celui qui le ressent et a suivi ce mouvement, à y être attentif, s'est accru lui aussi. Il y a quelque chose de plus grand à l'intérieur de lui, qui ne porte pas réellement de mots, ni de silences.
           L'amour change, avec le temps, comme la mer et la vision que l'on en a, l'amour change, avec le temps, comme la terre et la préhension que l'on en a. Ils se meuvent d'un mouvement qui semble si simple qu'on ne le voit pas, qu'on ne le voit plus. Il demande pourtant à ce que l'on s'y penche et le voit, pour grandir avec. Ainsi en vieillissant, peu à peu, on comprend toujours un peu mieux le murmure de la mer, et son silence, qui racontent à l'homme le moyen et la beauté d'aimer. Qui racontent à l'homme le moyen et la beauté de s'élever.
  
  
  

De ces mouvements, 1er jet abandonné

 
 
 
Ceux qui la regardent pour la première fois la voient avec devant les yeux les pancartes de leurs représentations, leurs attentes. Ils ne satisfont en soi que ces attentes, les désespèrent, vocifèrent, un peu, l’œil brillant comme un papier glacé. Les choses s'y reflètent, mais ne s'y impriment comme elles sont.
Ceux qui la côtoient chaque jour ne comptent plus les fois, où ils ne la regardent pas, ne la regardent plus. Elle est presque là comme un dû, et se doit d'être là, même s'ils ne l'attentent plus ni de l’œil, ni du pied. Ils ont des regards de papier chiffonné, glacé par l'habitude. Les impressions se rétractent dans les plis.
Ils ne voient pas l'histoire sans récit, la récitation sans mots. Ils n'entendent que leur propres mots, leurs propres pas qui tantôt tapent et tantôt crissent. Ils n'entendent pas ce mouvement qui crisse dans les graves. Ils savent juste qu'elle va et vient, à son gré, qu'elle joue agrès inlassablement.
  
  
 

Calibrage : Publication FPDV n° 35

 
  
Publication ce jour dans la revue FPDV revue Digitale, sur le thème "Mouvement"

Mes remerciements et amitiés pour me concéder une place in-extremis.

Le texte est lisible ici, ou comme à l'habitude ci-dessus.

La bonne journée
 
 

mercredi 30 janvier 2013

De la cueillette : Des objectifs




Il ne faut pas se leurrer,
pour toucher la cible,
il faut la main froide.
Atteinte,
elle n'empêchera pas
de toucher chaudement
le cœur.
  
  
  

mardi 29 janvier 2013

Des précipitations




il suffit d'un coup de froid entre nous,
et au premier coup de vent,
tout ce qui nous liait et
séparait en même temps s'écroula...
ne reste que ce qu'il reste
dans les vieilles machoires
la frontière édentée
du silence
  
  
  

lundi 28 janvier 2013

Du manquement



je devais suivre
la prière de l'étoile
manque de chance
elle était un peu couverte
un peu frileuse
et je n'étais pas mieux
à lever les yeux au ciel
je ne m'étais pas aperçu
qu'elle s'était vêtue
d'un manteau de neige
pour descendre
sur terre


ne pouvait-elle pas rester chez elle ?
  
  
  

De l'origami

  
  
  
Le repli
n'est peut-être
ni solution
ni suffisant
nier ne sert plus
transformer la charge
passer du poids
au déploiement
et le dépli
étale met à plat
ce qui auparavant
détalait ou s'entassait
passer de la charge
à la charge
à voir si
la résolution
augmentera
la netteté
à voir
à voir
ce qui restera
des envolées
de coups de pieds
dans les tas d'ailes
  
  
  

dimanche 27 janvier 2013

Du piquetage









Parfois,
impossible de
mettre cœur
à l'ouvrage
trop haut
trop lourd
comme de
pierre alors
en tailleur
il faut couper
trancher court
aller tailler dans
le grain du jour
ajouter un peu de clair
sur l'obscur de sa pierre
  
  
  

jeudi 24 janvier 2013

Du souffle



Assis sur le poing

l'esprit qui fuit

prendre
                                          le regard
en pleine                     face

quelque chose
pourtant

                                        se lève



  
  lancer & lire, & relire & ... le temps du morceau...
  

Du terrassement




le terrassier coule sa dalle                                                                              il pense aplanir la spirale
élève à ras de terre                                                                                                     d'un coup de règle
le plateau de prochains repas                                                                                      et lance sa toupie
dans le jardin des autres                                                                             pleine se vider pour d'autres


il se dépense à remplir                                                                                                  à coups de pelle
les quatre planches                                                                                                       sa tête de pioche
des soirs d'été                                                                                                         penchée à rehausser
nourrir le rêve des autres                                                                                    la condition des autres


                                                                      ce faisant
                                                                  et faisant bien
                                                                 sans penser à lui
                                                                     et ce qui le
                                                                      terrassera
  
 
 

mardi 22 janvier 2013

De la photographie


  
  
J'allais tu sais j'allais mettre quelque chose de doux souvent la certitude est là la certitude elle est là que je peux évanouir le reste que je peux tu sais j'en ai déjà parler absoudre les sons l'autour par l'entourloupe d'une fixation de la fixation regarder loin devant et entendre par les yeux ce que je ne vois pas ce que je ne peux plus voir alors là la certitude elle est là il n'y a plus rien d'autre et pourtant j'entends et je vois quand même je suis coupé et le fil de sang me relie quand même et j'appréhende le tout qui se dissèque seul et ne me touche que ce qui importe que ce qui est là-bas loin seulement il y a ces jours le sais-tu tu le sais je te tutoie un peu je me tutoie c'est une façon de me tuer ce n'est pas à toi que je parle ce n'est à personne c'est juste pour sortir parce qu'il y a ces jours où ils ne suffisent pas ces jours où les yeux sortent sans permettre de rentrer en soi sortir les yeux gros du ventre alors qu'ils pendent jusqu'à terre alors qu'ils traînent à terre là c'est un jour comme ça c'est un jour où je livre et c'est tout c'est un jour où je délivre alors que j'allais tu sais mettre quelque chose de doux un peu mièvre un peu sec faut des deux toujours il paraît il y a les deux toujours mais non ce sera pour plus tard car j'ai essayé aujourd'hui j'ai bien j'ai essayé j'y ai bien mis du mal et sans succès alors je livre je délivre c'est pas mal je ne te dirai si ça marche mais c'est comme ça c'est toujours comme ça même dans les formes tu sais ces vieilles formes à quand on met des rimes ou pire des vers des jolis vers mesurés qui pourtant débordent c'est parce que c'est ce que je connaissais en fin de compte comme ces formes aussi qui se sentent qui ne se sentent et s'obligent à insérer du merde bite et couille ou morve avec une jolie image à casser à caser ah ces besoins le besoin de c'est plutôt ce serait plutôt comme ça que je verbalise un peu mettre à l'amende du langage le monde la préhension mais qu'on s'en fiche que je m'en fiche après j'oublie on oublie tout et rien en fait oui l'habitude je connais Jacques aussi je disais ça coule c'est une diatribe un continu lorsque tu additionnes le ressenti et le sentiment tu obtiens le ressentiment et des conneries annexes je retiens ça tu bondis si je te dis c'est toujours ainsi c'est un continuum il n'y a pas pas vraiment de travail si dedans c'est dedans mais ça passe que ça passe la frontière du sang d'encre je relis je change oui les fautes et encore et point barre c'est peut-être la différence avec les autres c'est peut-être la différence avec le reste ce qui reste tout ce qui reste la musique elle est là à se voir et là et aujourd'hui tous ces sons j'ai beau crié ils restent je suis parasité ils sont pleins comme je suis plein mais pas saoul des sons pas des sons des bruits des pollutions des assoiffés qui t'assaillent tu sais comme légion mais sans purge et sans salut les contradictions des demandes des missions des ordres transmis à transmettre c'est bien long c'est bien trop long pour être en loup de mer et pourtant ils me débordent les bruits impossible d'en faire silence je tends les yeux les oreilles un peu plus un peu plus loin mais il n'est pas là il ne veut pas faire silence je n'arrive pas à faire silence de tous de tout ces sons même en criant même en taisant c'est laborieux je sais bien comme la lecture comme l'écriture mais c'est cela c'est un flot l'instantané un peu la tannée parfois comme là comme le jour où la certitude elle n'est pas là où elle devrait juste parce que juste parce que je n'arrive pas pas à faire cesser le bruit ça se rejoint le son là est de dehors est du dehors mais dedans pourtant il ne sort pas ne veut pas sortir faire silence je sais bien comme l'écriture comme la lecture mais c'est cela ils viennent puis se barrent et le reste et ça aussi comme ils disent c'est de la littérature oui des conneries peut-être peu palpables pourtant je le tiens ou il me tient et me serre et je pourrai j'arriverai à lui tordre le coup à ce bruit alors je te tutoie comme ça je tue moi un peu ces parts-là se partitionnement s'incisent cartharsisent alors merde ce devait être doux c'est plus un pavé dans le palais à oublier quand quand ils seront partis ces sons ces putains de sons quand tu cherches quand je cherche le sentiment et le ressenti ce sera peut-être demain le silence sera fait à l'intérieur il y en a d'autres il y en aura d'autres comme tout le monde comme le monde entier qui te fais chier quand il rentre chez toi quand il rentre en toi et que désolé pour le coffrage j'avais pas la clef et le pied de biche pour livrer sans les planches avec uniquement l’offuscation la suffocation de l'esprit tu sépareras l'ivraie du livré toi-même j'ai besoin des deux mains pour la prise de tête pour me tenir le crâne parce que je retiens que le ressenti et le sentiment accouchent du ressentiment et que j'ai besoin de me coucher
  
  
  

dimanche 20 janvier 2013

De l'an sur le tamis

  
  
  
Bon, ben voilà. Ouep, voilà. Ben.

L'insomnie a eu du bon. Elle a pris du temps, un espace à l'intérieur. Déplacer un part de soi, en soi. Pas trop loin. Juste assez. Juste assez pour réordonner. Ou ordonner, tout court. Ordonner un immense bordel en un autre. Pas mieux ranger. Clair, autrement.
L'insomnie a permis de penser, penser à réécrire. Et réécrire. Puis d'ouvrir une fenêtre, un passage. Un peu ailleurs. Ça fait un an là, à quelques heures.
Et beaucoup de choses ont changé. De place, un peu. De peu. Que je peux regarder. Vu que tout est posé, ordonné. Parfois je retrace, déroule l'archive. Kitsch un peu, tout de même. Mais bon. Je me permets, ça fait un an.
Un peu plus que je pose sur des bouts de papiers, un peu partout, n'importe quoi. Pas n'importe quoi. D'abord ce qu'il fallait. Il en a fallu. Un travail. De mise en abîme, ironiquement. Se mettre en abîme. Histoire d'en sortir. Sortir des histoires, accessoirement. Non, pas en accessoire. Ça a été un travail, l'ordonnancement. Il venait de loin. Du loin des nuits dans la nuit. Dans les nuits sans nuits.
Et quand je déroule, et recule, je vois bien que des choses ont changé. De place. Un peu. Déplacer.
Les mots mêmes ont changé. Il reste ces thèmes, et les mots qui vont avec, ou pas. Quelques façons de voir, donc de coucher, et ces autres qui ne sont plus. L'écriture a changé, ce qu'elle raconte a changé. Enfin, si peu pourtant. Elle ne raconte que ce que je raconte. Et ce chemin en parti. Et ce partir sur un chemin. Se récupérer. Faut bien. Fallait bien.
Un peu comme le lecteur. Certains sont restés, depuis presque le début. Celui qui lit, c'est un peu celui qui te tient la main, après que t'as écrit. Parce que tu sais plus trop quoi en faire. Elle te gêne. Elle attend. Alors t'es bien content, quand même, que quelqu'un passe, et en lisant, te tient la main, la serre comme un bonjour, un assentiment. Même si en fin de compte t'aurais écrit quand même.
Et il y a ceux qui passent, ceux qui arrivent, ceux qui flânent, passent une fois. Saluent parfois en passant. Comme toi tu passes par ci par là, ailleurs.
Je me suis souvenu récemment pourquoi j'avais écrit. Ces fois-là. Un enfantement nécessaire. Il faut bien en tisser, des fils, faire la corde, pour partir en cordée. Puis avec le temps, tout ce temps qui se déplace, les mêmes raisons que les autres, à peu de chose près. La nécessité. En quelque sorte.
Vrai, en somme, le bilan n'est pas dégueu. Subjectivement. C'est pas mal, ces déplacements, en fin de compte. Les mots des marées viennent d'un abîme, et se rendaient droit échouer sur la grève, ventre à l'air. C'est déjà quelque chose. S'échouer ventre à l'air. A plat, sans plus de recoins. Ces angles. Mis à plat. Ils viennent toujours des abîmes, mais à présent, j'y ai pensé, quand on m'a demandé, il n'y a pas longtemps « Les mots des marées, c'est quoi en fait ? ». J'y ai pensé. C'est con. C'est kitsch aussi. C'est le monde. Celui qui ne se voit pas, ou qui se voit justement. Qui ne se dit pas, ou qui ne dit pas. Disait pas. C'est un monde parallèle sur un méridien de réalité. C'est une part d'une certaine réalité. Mouep, une distanciation de soi par rapport à soi. On ne parle mieux que de ce qu'on connaît. Ou croit ou cherche à connaître. Ce n'est que moi, et tant pis.
Quand je regarde, j'en aurai réussi à mettre, des mots au kilomètres, de mots à distance, tissés. Pour remonter. Parce qu'il y en a eu, des kilomètres. Des marches chaque jour ou presque. Réussir à aller au devant, à l'avant. Il n'y a pas que les cors qui tiennent au corps.
Je sais qu'il en reste plein. Je suis content de ceux-là. Je peux les regarder. Bien en face. Je peux pointer chacun sans baisser les yeux, comme je peux lever les yeux maintenant.
Tu sais, ces mots, ils m'ont tenu la main, avec d'autres. Je commence.
Oui, je commence à tenir les longueurs. Je tiens aussi aujourd'hui la longueur d'une main graduelle. Une qui grandit, vers la vie en même temps qu'elle me promène vers ma mort. Mais c'est bien, tu sais. Il y a des largeurs, et quelques largesses, sur les longueurs. Et celle-là, elle en demande du temps, que je déplace-là, maintenant. Surtout.
Sur la longueur, il y aura d'autres choses, encore, sûr. Je sais bien que rien de sérieux ne peut se projeter, parce que l'ordonnancement, c'est de l'urgence. Que j'habite à présent certaines longueurs, et que d'autres ne sont qu'au début. J'aime bien déjà ceux-là, les chemins tracés sur cette plage, ces plages. Oui, j'aime bien, et sûr, y'en aura d'autres. J'y retourne souvent. J'y retourne toujours. C'est jamais pareil. Toujours un peu, mais jamais.
Comme j'appris à desserrer le poing, je commence aussi à savoir le serrer. Sur la longueur.
 
 
  
merci à ceux qui passent, ceux qui laissent, ceux qui délaissent, ceux qui ont fait que, qui font que,
 à dire comme ça, mouep, c'est bien celle-là qui le vaut.

samedi 19 janvier 2013

Du déneigement


  
  
Il est des matins
plus difficiles
que d'autres
pour mettre la main
sur la pelle
pour déneiger le seuil
de sa gueule
tout autant livide
que pleine
de cristaux de vide
pas pour autant
qu'il faille
laisser de côté
les bottes du jour

 
 

jeudi 17 janvier 2013

De la peau fêlée



 
 
marcher sur la peau
                                 craquelée
vêtu de la peau
                          craquelée

fragilité posée
                         sur du fragile

et pourtant appuies
                                 sans traverser
et pourtant appuies
                                 sans transparaître


c'est la fissure qui tient, c'est la fissure qui fait


                                                            et le pas
                                                                               meuvent
                                                           et le vent                       un temps
                                            figé entre
                                             les dents
                                                                                                de la terre

                                                            et serre
                                                                serre bien
 
 
  

mercredi 16 janvier 2013

De la main à couper

  
  
  
Les arbres dans le vent ou le vent dans les arbres
c'est elle qui ruminait la main à couper
en fermant les yeux bien haut vers les cernes
les petites griffures et les mains coupées
la première neige d'hiver avait l'allure de
la dernière pluie d'automne en bord de mer
  
  
  

lundi 14 janvier 2013

De ce qui transperce





 
 
 

La voix du petit matin,
entre les mâchoires
froides de la nuit
 ressemblait un peu à ça...




elle n'eut pas besoin
d'entrée pour pénétrer...
  
 
  

samedi 12 janvier 2013

Des Nulles parts




Nulle part se rendre sans être poursuivi sans poursuivre croire suivre nul rivage visage baiser sans la pression des lèvres incliner le menton averse inverser la terre ou croire nul endroit arpenter sans l'image spectrale d'un fantôme charnel nullement dissolu à peine distendu distancié à peine nulle part le rendre le poids de la nausée engoncée entre le fond et le bord du fond au bord en travers nul paysage rêver sans embrasser les dunes s'embarrasser d'une et plus et encore nul envers retourner sans en miroir passer pâlir d'un sourire effacé d'une âme résolue d'une manche anémiée d'un deux côtés

Nulle part les rendre les mots la paix les armes les remettre les démettre nul présage mentir sans l'illusion du son son écho son écot à régler se déréguler jusqu'à la jugulaire nul revers essuyer sans que brille l'absence d'un billet mal écrit de maux infirmes et vides plié entre deux histoires entre deux côtes nulle part à rendre se rendre quand il ne reste rien autant nul visage rivage franchir d'une geste inverse à l'apanage sans panache nul détroit charpenté sans robe des marées décolorées grisées d'un mutisme salin sale un tirant de courant un tirant dans les pattes du regard à courir courir encore l'écore


Si l'on se perd on s'est perdu on sait perdu les âges nus où l'on entend les pas perdus des âges mus
  
  
  
réécriture du texte Nulle part, mars 2012

Des corrélations

 

 
On en passe du temps à se courir derrière, tâcher de se connaître, les uns, les autres, soi, au bout du compte, c'est le même. On découvre l'autre, se découvre en l'autre, couche un peu en somme se gausse ou désespère de s'être découvert, voire s'en indiffère. Est-ce là le meilleur moyen de foirer l'affaire ? Ce qui est plus sûr déjà, c'est qu'on en passe plus encore à tenter de s'éviter.
  
  
  

jeudi 10 janvier 2013

De la manufacture des cigares

  
  
  
     C'est un peu comme si le ciel avait roulé la nue sous son aisselle, avant de l'allumer. Certains ont vu la braise rougie, mais depuis, on n'aperçoit plus qu'une épaisseur grise crachée par la gueule atmosphérique. Certaines parties sont plus longues que d'autres. A ce barreau-là, il s'agrippe.

     Derrière, il y a quelque chose qui se balance, sûr. Mais quoi ? Et qui se balance, et puis quoi ? On attend, j'attends. De voir si ça choit, si ça chute. Que chute d'ailleurs ? Ça peut très bien rester accroché, suspendu. Glotte où la lumière grippe. Où les mains glissent. Alors fume avec.

     Sans savoir quoi, la sensation du décrochage, accroché à la cabriole. A la chute. Mais pas celle d'échec, juste un glissement. Sans savoir vers où. Il se dirige, un peu comme cette fumée. Sans savoir vers où diriger le regard, hagarder les yeux. Juste de quoi hasarder quelques conjectures.

     Aller sans savoir, yeux vitreux derrière une vitre, derrière l'opacité d'un rien qui est bien quelque chose. Ce qui est sûr, c'est ce ciel qui joue les cubains sans penser qu'il y fait d'ordinaire beau. Qui joue avec ce qu'il a en mains, ou sous les bras. Et qu'on est à peine qu'un poil imprégné.
  
  
  

mardi 8 janvier 2013

Des bougies



 
il

petits
feux
saint
jean
ombre
propre
portée
deux
mèches
brûlent
un petit
bâton
de cire
modelé
et fond
se forme
petit bâton de cire


 

Des corbeilles

 
 
  
ce serait parfois si simple
                                            comme une page blanche
                                                            noircie
                       d'appuyer sur une touche

                                            comme une page blanche
                       raturer à vastes coups de stylo
                                              noir

se donner une chance de
                                            recommencer sans rien derrière
                                                                                                 ni devant
se donner une chance de
                                            commencer seulement
                                                                                   ou simplement

                                                     abandonner

- un peu comme ces mauvais textes que même l'auteur ne connait pas -


seulement même ceux-là
                                         ont existé
                 même un peu
                                         un temps

                                                                                                                            et cette putain
                                                                                                                              de corbeille
                                                                                                                                 est loin
 

lundi 7 janvier 2013

De la cueillette : Des prédestinations

  
 
  
Issue comme ce qui l'entoure d'un "accident", l'homme conscient de ses erreurs apprend d'elles. Cela rend évident deux des paradigmes de son équation génétique : premièrement, il n'a pas assisté à l'origine du monde ; deuxièmement, son subconscient est un inconscient. La preuve est : il tend sinon à l'accident, à la catastrophe.
 

 

dimanche 6 janvier 2013

Des révérences

  
  
 
Les hérons sont passés
sans plus de regret
dessus les marais
aux yeux d'autres cieux

Les étourneaux
ont élu domicile
dans les frênes
pourtant rien
ne les retient

L'émulation
résonne chaude
dans l'air humide
un canonnement
d'ailes

à nouveau
la place
de l'absence
  
  
 

samedi 5 janvier 2013

Tant à paraître


 

main courante à l'aveugle

sur le fil large de l'estran

à guetter l’œil au galop

les rouleaux qui s'amènent

qui ramènent

main coulante qui meugle

sur les façades calcaires

à guetter l'éboulement

le nœud au goulot qui serre

qui sert

de pied au cap où il se prend

où la langue se pend à goûter

le frissonnement des oyats

le balancement de soi

un poil
sur la peau
de la grève


main courante à l'aveugle

l'ombre de la silhouette

la silhouette de l'ombre

un talonnement à tâtons

du tanin

compotée de composition

le porté de soi qui s'allonge

le vide creusé du poids

comme du réel une prise

une méprise

entre mouette et goéland

les liserons se sanglent aux dunes

sans retenir la coulure des grains

aux commissures des vents

auvent de soi
à l'incertitude
pâle moulin


main traçante à l'aveugle

prendre part à la chevauchée

prendre la part des choses

comme elle est ou n'est

moulée

la main en fait des choses

d'autres que le pied d'autres

dessins d'autres desseins

dans la poussière de pierre

des pierres

de doigts comme des châteaux

de sable les phalanges améliorées

j'ai trouvé où me paumer

dans un sens ça se mérite

dans l'autre
aussi te donne
en donnant


un ordre des choses

un peu désordonné

à porter sa tanière

un peu partout autour

en tour

on laisse des portes

à n'ouvrir qu'invité

alors qu'à découvert

on dépose ci et là ses parts

se sépare

les petites beautés croisées

montées entre des croisillons

qu'on n'a plus qu'à fermer

les yeux pour les voir aux paupières

mosaïques
les voir même
quand c'est noir


alors cour en cour

peu chaut ou chaudes

vêtu de dénuement

on en laisse autant

aux vents

on s'en dévêt plus facilement

aime à croire en brassant

des bras des oreilles

un peu d'air un peu plus

un pas de plus

tantôt orge tantôt forge

boire un peu d'hier

dans de grands verres

bombés du torse

un dépôt
toujours
au fond


défaire les pieds des mains

pas de liminaire linéaire

les couleurs fractionnées

se rassemblent dans la courbe


les yeux 
ont besoin
de respirer
  
  
 

vendredi 4 janvier 2013

De la cueillette : De la cour des grands

 
 
 
La cour des grands, c'est juste cet endroit où l'on s'est convaincu qu'il y avait plus important que les jeux d'enfants.
C'est peut-être pour ça qu'elle est gardée si jalousement. La peur que l'on s'en rende compte...
  

  

jeudi 3 janvier 2013

Du cours



 
le temps est une couleuvre
à avaler sans se retourner
il court en ruisseau sinueux
alimenter nos soifs torturées


mercredi 2 janvier 2013

Du souhaitable




le réel
la pluie posée
et sa pause
le premier rayon

l'entortillement
du chant
des merles
dans l'air

la trille
dans la gorge
de l'enfant
brillant

la chape
scintillante
entre le crâne
et la lumière

pas ces souhaits
qui ne souhaitent
qu'attendre
que ça arrive