lundi 30 septembre 2013

Text-urée # 2




 
dans la bouche les dents comme des bornes où ne pas s'arrêter
les cellules se délitent mortes se dépiautent ce qui mord de vie
grêle et veines apparents s'échappent en réchappent fixement
s'arrêter à si peu
s'arrêter d'autant pour suivre du doigt enfoncer profondément
le poing dans l'entaille du visage la main jusqu'aux entrailles
suivre du doigt fouiller fouailler la dépose
il n'y a rien à voir
à fleur de pierre à feuille de peau crête à gravir dire en silence
il ne reste rien qui ne soit millénaire
toucher les graines suivre les nervures en dedans et en dehors
s'ensuivre les grains  toucher les nerfs en dedans et au dehors

comment s'accompagne
               comme on s'accompagne
 

 

Chemins battus




Le matin circule, emprunte les chemins, il est là.


Chemins Battus                                                                                                                Morgan Riet


il fait plaisir,
ça fait plaisir


dimanche 29 septembre 2013

Text-urée # 1



dépose comme au fond d'une boîte sans couvercle ni fond

luxuriance d'avant mort les branches si chargées tombent et
                                                                                          baignent
vertes dessus noires décomposées à la surface de la mare noire
il n'y a rien à voir dessous
la boîte sans fond ne retient et ça se sauve dessus dessous
la boîte noire ne retient rien et ça se suave dessus dessous
il n'y a rien qui ne se vaille que sur le coup tendu passe déjà
les branches sont si chargées que ça baigne dans la bouche
une sensation ferrugineuse sur les dents de la langue feuille
il n'y a rien à voir dessus
séparer c'est articuler comme prendre chacune des particules

décompose les nervures et les nerfs sans couvercle ni fond


l'automne effeuille
                           sa parole


 

vendredi 27 septembre 2013

De l'urgence à



Ils sont trop
ils sont trop nombreux

à vouloir remplir

la mer vide
les mots c'est la mer

ils sont trop à vouloir remplir
tout n'importe quoi

des espaces des lignes des pages des cases des livrets colonnes mastiquées de geste d'air d'encre de merde

ils sont trop nombreux à vouloir emplir se gonfler s'engoncer dans ce qui leur paraît toujours trop petit à ce qui ne leur paraît pas à leur dimension ils ont besoin c'est effréné remplir et remplir encore se sur-dimensionner

aller voir la mer

se ressentir petit
ressentir sa taille
se ressentir

ne garder que
n'être que
être

la mer vide
les mots c'est la mer

ne plus toucher terre
                        perdre
                                   pied


à la mer se vide les canaux rivières les fleuves les cours les pétroliers et les paquebots

les mots devraient servir à vider et non à remplir remplir REMPLIR ENCORE ENCORE ENCORE


Ta gueule connard !

                                                voilà trois mots, remplis-toi



les mots c'est la mer
la mer vide


je dois voir la mer


Des bagages



 
Il avait commencé à se préparer très tôt à la route
sans même le savoir encore, un instinct animal
dans sa croissance humanoïde
il n'avait pas lu ce qui s'écrit ni cru ce qui se dit
pourtant il savait déjà s'équiper et le balluchon.
Un immense mètre carré de bouloches synthétiques
deux kinders discounts dans leur papier aluminé
un opinel à la lame d'automne émoussé
une boîte d'allumettes de cuisine soigneusement
reconstituée par des prélèvements journaliers
deux bouts de ficelles et un bandana rouge vif
comme portait Renaud, plus trois paquets de gâteaux
sur la tête un chapeau de cow-boy
sur le dos sa cape de Zorro et son chapeau
de cow-boy taille 53 il traversait les pâtures
derrière chez lui se réfugier à l'autre bout du monde
à l'ombre dans les bosquets du bocage.
Il avait commencé très tôt à se départir
de la famille à partir de sa famille des repas
de famille des cérémonies de famille puis à ne même
plus partir de car ne partait plus à aux pour sans
infinitif et point. Le privilège de se garder seul.
Il gardait le secret des jardins sans routes à couper
à travers champs droit jusque dans les bois
préparer le corps à la marche la longue marche
parce qu'inconsciemment il avait commencé
à se préparer très tôt à la route améliorer le paquetage.
Puis il a suivi la route encore tracée rentré dans les clous
puis à chercher du regard l'horizon
alors qu'il avait réussi
à n'avoir plus rien qu'à tailler la route l'horizon
il l'a croisée s'est décidé pour
une route verticale.


 

jeudi 26 septembre 2013

Des hommes sables



 
Hommes sable
peau de grains

arène amarrée
nouvel animisme

déminéralisé
nombre agglutiné

les uns les autres
enfoncés engoncés

quelques-uns
à rouler aux

larmes de mer
- les vagues -

voient
et le trouble

ci-fait
 

mercredi 25 septembre 2013

De l'étagère




 
ne pas vouloir
à demeure
longtemps cru
enclin à l'étagère
comme un livre incliné
celui prêt à choir
détaché
prêt du hachoir
à s'effacer
juste le lointain

vite cesser
de monter
des châteaux de sable
plutôt grimper
les dunes
donner du large
aux yeux
saisi vite
la marée
glissement de
terre et liens

on aimerait parfois
être un beau livre
serré chaudement
dans sa couverture
l'intérieur
serait bien peu
important
juste savoir
se poser


 

mardi 24 septembre 2013

Du spiralaire



 
causes du désespoir

désespoir de cause

                     à ce qui défait
restent le jeu
                     des effets


lundi 23 septembre 2013

Programme de nuit



 
il s'est endormi sur le final
de Blanche-Neige et mon épaule
à deux, trois est le milieu de la nuit
la grande aiguille contracte son corps
pour une minute cuvette
puis se rendort deux trois
coups de balai pour chasser
la poussière de sommeil
un autre ballet délaie le précédent
la biche les nains la sorcière
demain ce matin on s'raconte
un autre conte de fée
où le héros s'appelle docteur


 

dimanche 22 septembre 2013

Des petites graines




- la peur de ce que nous fûmes est parfois la terreur de ce que nous serons -


Last step

 

 


Une
première
vague

a pris
le large






C'est le matin que l'on grandit,


tirage à 50 exemplaires
sur papier Vergé 120 gr
3,50 e
commande par mail



jeudi 19 septembre 2013

Un tour dedans, revu & corrigé




Il s'y ferait presque, aux marais. Après tout, de l'eau, c'est de l'eau, la pluie ne le dérange pas trop, surtout après ce soleil. Après tout c'est de l'eau. Au crépuscule il n'y a plus personne ici, il y a le monde, et c'est bien. Il peut sortir et le chien.
Ils ont commencé il y a quelques semaines. Ils sont un peu pareils, ils sont pareils, lui canin. C'est exacerbé dans son animalité. Là, comme ça, il n'y a aucun danger, c'est son doigt, son œil. Et ils y vont. Ils y vont, seulement il suffit d'un autre d'un congénère canin, et c'est la guerre. La bataille, la charpie, dans des nues de poils. On n'y peut rien, c'est comme ça, de nature, ça dégénère. Il s'y fait, le maître. Le chien ne supporte pas l'autre. Il aurait préféré que ça lui soit égal. Du moins qu'il fasse semblant, comme lui. C'est un chien. Ça lui aurait évité de lui démettre l'épaule, percer l'tympan, chaque fois que quelqu'un a oublié de rentrer quand ils sortaient. Il en a pris parti, de n'être pas politiquement, même si parfois c'est excessif. Il a le mérite de rester entier dans son enveloppe de trente kilos. C'est bien cela, sa moitié en balance au bout d'une corde, quelques poils en plus. Une nature excédante. Ils ne se lâchaient pressés la grappe qu'au cavalier.
Quand ils ont vérifié que personne ne restait, ne pouvait y rester, c'est parti pour lui. Le vrai départ. Plus de laisse jusqu'au retour. A cette heure-ci, c'est lapin borgne et héron accoudé au vent. Ils franchissent, et le chemin schiste rouge. Le chemin de schiste rouge qui ne leur appartient est à eux. Il repasse son nez sur toutes les traces du jour en se souciant de celles de la veille, tandis que l'homme repasse les ordres du jour et ceux de demain au fer à souffle. C'est entre reprendre et reprise. Il se fait trois fois la promenade dans ses allers et retours, et l'homme en revient. La pluie s'est remise sur les dos noirs des terrils, l'épine s’embrunit de gris-mauve. Demain matin, elle sera la brume qui monte des champs et des tourbières.
Tant que le clope ne prend pas l'eau. Sa chaleur remonte le long des lèvres, un baiser, jusqu'aux extrémités de la fourrure. La fumée de s'aplatir sous le rebord du chapeau, avant de se faire happer par un jappement d'air. Quand ça souffle fort, ça siffle. Le trot du chien. La locomotive chemine en dehors des rails. Sans les rails nous avançons. Ça fait quelques semaines, ils oublient le quai, le cavalier. C'est un peu plus tard, un peu plus froid, il sort sans la laisse.
La première fois, il n'a pas compris, n'y croyait pas, marchait d'un très beau pas, juste comme il faut. Depuis il a compris, et triche déjà un peu, dépasse d'une tête. Enfin y croit. Dans sa joie se fait tous les poteaux, fait peur aux coureurs endimanchés du mardi et des autres jours. Ils prennent le pied, les mains pleines. Parfois il se dit, entre deux bonds, qu'il aimerait bien laisser l'oppression du crâne dans la vase mitoyenne, où certainement elle ne serait pas tant dépaysée. Avec une pincée de la certitude des doutes qui collent aux basques avec la boue sur l'absence de guêtres.
Il voit bien les lentilles vertes agglutinées jusqu'aux bords des yeux, si proches qu'elles font des tâches noires. Mais il n'essaie même pas. Il sait que ça prendra encore, alors lui il lui délaisse à la porte le licol, tant qu'il tient encore. Tant qu'il tient encore à sa voix, à la voix qui ordonne « reste en vie, prends ton pied entre les pattes ». La truffe humide, l'eau c'est bien de la vie, et il croit toujours que celle en tête avec la pluie ruissellera de ses oreilles. Se sent si bien à chacun des pas sur lequel il appuie de tout son poids de vide. Il se prend à rêver alors que sans sa laisse, il n'y pas que lui, l'animal, il y a lui aussi qui se promène sans laisse. Que tant que le chien halète au dehors, il s'allaite des espaces aérés d'entre les bordures, que sa barbe ne soit pas le barbelé des céphalées. Qu'il ne serait pas décent de se tailler au rasoir des tempes jusque dans le crâne.
Pourquoi toujours vouloir remplir le vide des espaces ? Il espère sans espoir. Il espère ce qu'il faut. Cela même, on peut bien y arriver, arriver ce qu'il faut faire. Ce qu'il faut pour n'être pas comme lui, mais chien fidèle à lui-même, inconditionnellement à sa condition d'imbécile inadapté. Cependant Il voit sa bête soumise à sa propre hérédité qui se retourne en lui, se retourne contre la main qui le nourrit. Comme lui se retournait contre la bouche qui le nourrissait. Lui, un autre encore. C'est vrai, les mains donnent et reçoivent. Et de l'autre côté il y a toujours une gueule pour recevoir ou donner. Il se remémore ce même repentir dans l'haleine d'après avoir mordu. Cette même haleine du renfermé qui vient de loin dedans. Même si l'un est chien, et l'autre homme, ils n'ont qu'un devenir ancestral.
Ils ont commencé à retravailler sa docilité dans la liberté. Il essaie d'y abandonner sur la route,avec les bagnoles qui passent, le son interne et rond de la gomme sur le macadam, les branches mortes des synapses dans les marais. Et la liberté conserve ses distances de sécurité. Elle évolue le long d'une laisse invisible, cérébrale. Il y a toujours quelque chose qui tient l'être, conventionnellement impalpable, contracture presque contractuelle qui ne nécessite pas de signature. La signature est d'homme, sans mécanique. C'est pour se rassurer qu'aux animaux sont prêtés des sillons d'états d'âmes.
S'il y a similitude d'attitudes, ce n'est qu'un crédit, une fausse largesse, un renvoi. Il n'y a que le déterminant du nom et la marge à créer en déchirant. Ainsi marchant il remonte la mécanique de deux histoires qui se rejoignent. Et démontent sa tête, laissant le détachement des pièces s'entasser contre les parois. A chaque pas, cliqueter cliqueter cliqueter.


 

lundi 16 septembre 2013

Un mot sur

On ne lit plus. C'est pas vrai. Les meilleures ventes de l'été 2013 sont décrochées par Nabila et ses phrases. Des Guillaume Levi et Marc Musso publient de façon régulière, voire effrénée. Mais il y a le sentiment qu'on ne lit plus. D'ailleurs souvent quand on lit, on lit mal. De travers. C'est à dire de biais, mais aussi même du début à la fin, les mots ne sont pas compris pour ce qu'ils sont. Je ne comprends pas moi-même le tiers de ce que je lis. On lit mal. On sur-lit.
On écrit mal aussi. Pas uniquement syntaxiquement. Lexicalement aussi. On emploie des mots pour d'autres, prêtent des sens et bien souvent, omet ou déforme des sens de mots. On troque des mots nouveaux, dans le vent, éventés, contre de vieux mots désormais désuets. On sur-écrit. On lit mal, on écrit mal.
On ne s'intéresse plus à la politique, ou mal. Toutes les semaines de nouveaux rebondissements, la majeure partie ne concernant la patrie. Juste la petite grande vie de figures. D'apparentes lois soulevant de fausses questions masquant mal leurs allures de cache-misère. Parce que les questions reposent sur de mauvais fondements. Mais tant que l'homme n'a pas véritablement besoin de survivre, pas suffisamment faim, on sur-politique. On politique mal.
Vit-on mal ? On vit. L'homme connaît des alternances de survie et de vie. Et quand une partie connaît une trop longue période de vie, il oublie ce qu'est la survie. Et la vie ne le satisfait plus. Il se crée une sur-vie. Une vie dessus la vie. Plus besoin d'attendre une vie après la vie. Étrange période que celle où beaucoup quitte peu à peu la vie et entre peu à peu dans la survie, tout en courant après la sur-vie.
La sur-vie, qu'est-ce ? C'est une vie distendue, distanciée de ce que devrait être « naturellement » une vie ( non normée, chacun en a son idée, mais basée de raison ). Et cette sur-vie est le point où tendre à se rompre le cou. Vendue comme désirable. Ce qui fait qu'on la désire. Le mécanisme de la violence et du désir étant mis à jour, plutôt d'en faire profiter, on s'en sert pour créer du profit. On montre une image d'être à atteindre, avec ses accessoires, ses attitudes. Seuls ceux qui en ont les moyens s'y baignent jusqu'à miroiter eux-mêmes, les autres s'éclaboussent maladroitement et se donnent l'illusion de l'illusion des premiers. On sur-vit, balbutie à sur-consommer.
De ceux qui veulent prendre du recul sont perçus d'arriérés à vouloir trop regarder en arrière, soit d'utopistes à vouloir voir plus loin. On sur-vit parce qu'on doit voir cela. A s'en remplir, encore d'idées, d’artefacts creux. On sur-vit parce qu'on veut le voir, et nous le montre. Faudrait-il ne plus voir ? Voir par soi-même. Il faudrait arrêter de sur-voir. Il n'y aurait plus aucun sens à regarder. Il y aurait la place pour voir ce qui est. Et trouver quelque équilibre.
En attendant, voici sans doute un billet mal écrit, qui sera mal lu, parlant mal d'une politique mal comprise, sur des vies mal cernées et des hommes mal encadrés. Un sur-billet pour ne pas dire grand-chose, consommé immédiatement, et chassé immédiatement.

samedi 14 septembre 2013

Step 2



 





Entre les tempes du matin résonnent les spasmes des réveils de la nuit, tandis que là-bas, dans la rosée luisante, le foin encore attendri reste couché.


# 5






On ne peut tourner une page
sans y laisser une trace du gras du doigt
sans y laisser un peu d'encre en soi

                                                    # 5 








 

De la noyade



 
Il aime à noyer sa vie
quelques secondes
dans l'accent grave
de ses yeux devenus
sérieux serrés
plus profonds qu'un
arrière-plan d'eau qu'un
fond d'étang létal
il aime à noyer son vit
dans l'apnée trop brève
de leurs regards


 

vendredi 13 septembre 2013

Des appartements de Nox



 
L’Est est le petit-salon
bourgeois de Nox qui,
en fin de repas, de répit,
plonge son demi-tasse
dans le pétrole de sa tasse.
Elle embrase ainsi le jour
du purin et soulève la
brume du petit matin,
puis s'en va dévorer
ailleurs d'autres rêves
noirs de sa mâchoire
édentée d'étoiles.
Quant à l'Ouest,
le cabinet d'aisance
du jour digéré.


 

jeudi 12 septembre 2013

Un tour dedans



 
Je m'y ferai presque aux marais après tout de l'eau c'est de l'eau la pluie ne me dérange pas trop surtout après ce soleil après tout c'est de l'eau au crépuscule il n'y a plus personne ici il y a le monde et c'est bien je peux sortir et le chien
nous avons commencé depuis quelques semaines nous sommes un peu pareils nous sommes pareils lui en chien c'est exacerbé dans son animalité là comme ça il n'y a aucun danger c'est mon doigt mon œil et on y va
seulement il suffit d'un autre d'un congénère et c'est la guerre la bataille la charpie dans des nues de poils on n'y peut rien c'est comme ça dégénère je m'y fais il ne supporte pas l'autre j'aurai préféré que ça lui soit égal
du moins qu'il fasse semblant comme moi c'est un chien ça lui aurait évité de me démettre l'épaule percer l'tympan chaque fois que quelqu'un a oublié de rentrer j'ai pris parti qu'il n'était pas politiquement même si parfois c'est excédant
il a le mérite de rester entier dans son enveloppe de trente kilos c'est bien ce que je dis ma moitié en balance au bout d'une corde quelques poils en plus je l'ai dit il est excessif on ne se lâchait la grappe pressée qu'au cavalier
quand on a vérifié que personne ne restait ne pouvait y rester puis c'est parti pour lui plus de laisse jusqu'au retour à cette heure-ci c'est lapin borgne et héron accoudé dehors au vent nous franchissons et le chemin schiste rouge
qui ne nous appartient est à nous il repasse son nez sur toutes les traces du jour en se souciant de celles de la veille tandis que je repasse les ordres du jour et ceux de demain au fer à souffle c'est entre reprendre et reprise
il fait trois fois la promenade dans ses allers et retours et j'en reviens la pluie s'est remise sur les dos noirs des terrils l'épine s’embrunit de gris-mauve et demain matin elle sera la brume qui monte des champs et des tourbières
tant que le clope ne prend pas l'eau je sens sa chaleur remonte le long des lèvres jusqu'aux pointes de la moustache la fumée s'aplatir sous le rebord du chapeau avant de se faire happer par un jappement d'air
quand ça souffle fort ça siffle et le trot du chien la loco chemine en dehors des rails sans les rails nous avançons ça fait quelques semaines nous oublions le quai le cavalier c'est un peu plus tard un peu plus froid il sort sans la laisse
il n'y croyait pas marchait d'un très beau pas juste comme il faut depuis il a compris et triche déjà un peu dépasse d'une tête enfin y croit et dans sa joie se fait tous les poteaux et fait peur aux coureurs endimanchés du mardi et des autres jours
on se prend le pied dans les mains parfois je me dis j'aimerai bien y laisser l'oppression du crâne dans la vase où certainement il ne serait pas tant dépaysé un peu de la certitude des doutes qui collent aux basques
je vois bien les lentilles vertes agglutinées jusqu'aux bords des yeux si proches qu'elles font de noires tâches mais je n'essaie même pas je sais ça prendra encore alors lui je lui délaisse à la porte le licol tant qu'il tient encore
à moi à la voix à la voix qui ordonne reste en vie prends ton pied entre les pattes et la truffe humide l'eau c'est bien de la vie et je crois toujours que celle en tête avec la pluie ruissellera de mes oreilles quand toi et moi échangions sur le sujet
nous en espérions en conclusion que nous somatisions mais j'aurai préféré peut-être pas un moindre mais un autre mal que celui-là qui ne se voit pas mais se sent si bien à chacun des pas sur lequel il appuie de tout son poids vide
je rêve alors que sans sa laisse il n'y pas que lui il y a moi aussi qui me promène sans laisse que tant qu'il halète au dehors je m'allaite des espaces aérés d'entre les bordures et que ma barbe ne soit pas le barbelé des céphalées
j'espère sans espoir j'espère ce qu'il faut cela cela même on peut bien y arriver arriver ce qu'il faut faire ce qu'il faut pour n'être pas comme lui mais chien fidèle à lui-même inconditionnellement à sa condition d'imbécile
cependant je le vois soumis à sa propre hérédité qui se retourne en lui se retourne contre la main qui le nourrit ce même repentir dans l'haleine d'après avoir mordu même s'il est chien et lui homme nous n'avons qu'un devenir ancestral
nous avons commencé à retravailler sa docilité dans la liberté j'essaie d'y abandonner avec les bagnoles qui passent le son rond de la gomme sur le macadam les branches mortes des synapses dans les marais


 

mercredi 11 septembre 2013

Next step




Parce qu'il faut passer des paliers, franchir des étapes, monter des marches, etc...
Mise en vente d'une plaquette artisanale 21 x 7,4, impression sur papier Vergé, tirée à 50 exemplaires


- C'est le matin que l'on grandit -


Les petits mots du matin ne sont pas tous doux. Ils sont parfois le prix de la nuit ou le coût du jour. Ils ont leur histoire. Ils ne vivent pas seuls.
Ils donnent huit jours pris de l'année pour tâcher de raconter.



 Disponible au 20 septembre 2013


 Questions techniques :

C'est le matin que l'on grandit est un choix et assemblage de textes postés sur le blog depuis sa création, parfois retravaillés, parfois non. Il n'y a donc pas d'inédits (principe de prévention).
Il est disponible pour 3,50 euros en commande par correspondance (franco de port). Pour être transparent, cela équivaut à ce qu'il me faut pour rentrer dans les frais, et une marge approximative de 10 balles, histoire de présager une nouvelle plaquette d'ici quelques mois...


La commande :

M'envoyer un mail (lesmotsdesmarees@gmail.com), afin de récupérer votre propre adresse, où je vous communiquerai l'adresse postale. Vous pourrez ainsi m'envoyer un petit mot, accompagné de votre propre adresse postale et d'un chèque.
Le traitement des mails reçus commencera dès le week-end du samedi 14 septembre.

A tantôt,

Des programmes




Dans l'alcôve de son véhicule, il se parle à lui-même de la journée à venir : on doit on doit on doit on doit on doit doit doit doit doit doit doigt dans le nez. Puis il écrit un poème.


 

lundi 9 septembre 2013

Un cailllou dans la bouche





Bien sûr qu'il savait parler, petit. Mais ce n'est qu'il y a peu qu'il s'était rendu compte. S'en était rendu compte. Ces premiers mots raisonnés, ordonnés de pensées, il les avait articulés, il les avait appris avec des mots de colère qui n'étaient pas les siens. Une colère qui n'était pas la sienne. Une colère qui l'effrayait. Alors les premières années il ne s'en était pas servi. Il garda encore quelques années ce langage intelligible et utilitaire, ce langage inintelligent. Avec ses mots. Jouer Manger Pisser Fatigue Dormir.
Puis, progressivement, il apprit à les enrober. Car il faut bien parler, car il faut bien échanger. Il faut bien grandir. Il apprit à les enrober, un peu comme des friandises. Enrobés de mots-sucrettes ou de voix douce. Il ne voulait pas qu'on les entende, ceux de colère, qu'ils s'attachent dans le pavillon de ceux qui les entendaient comme ils s'étaient incrustés dans le sien. Qu'ils marquent ailleurs comme ils l'avaient marqué. Il avait appris à parler avec des mots de colère. De là lui venait certainement la sienne.
Pour mieux les enrober, mais aussi tuer le temps en ouvrant ses tripes et les étaler, faire durer jusqu'à, jusqu'à ce que, il s'était mis à lire. Non pas, à dévorer des livres. Il apprit comment on met un mot plutôt qu'un autre, comment on omet un mot, comment on commet poliment. Alors sa voix prit d'autres mots, et en même temps qu'il enrichissait son vocabulaire, il grandissait ses pensées. Seulement il n'y avait personne derrière le livre pour répondre à ses questions. Il n'y avait personne pour écouter cette voix qui s'assourdissait.
Pour autour, c'était un gentil garçon qui marmonnait au lieu de parler. De toute façon, il n'avait rien d'intéressant à dire. Qu'aurait-il pu bien avoir à dire, de toute façon. Lire Manger Pisser Asperges Dormir. Peu grand chose de plus, de plus il n'était pas drôle. Cette voix s'assourdissait et butait, trébuchait comme si elle rencontrait des nids de poules dans l'air. C'était un garçon monocorde. On pensait bien qu'il ne pensait rien.
Puis, progressivement, la colère le prit l'enroba. Car elle était toujours présente. Car il faut bien vider. Lorsqu'elle fut trop présente, si présente qu'il n'entendait plus qu'elle, il essaya de lui parler. Il lui parla, mais avec cette voix là, elle ne l'entendit pas. Alors il prit ses propres mots à elle, alors elle l'entendit. Et se fâcha derechef. Elle se fâcha si fort qu'elle s'imprima sur lui, en lui. Elle était devant lui, elle était dans sa bouche, dans la vibration de ses cordes. Était la vibration de ses cordes. Tant et tant qu'il ne pouvait ouvrir la bouche sans qu'elle soit avec lui. Même si les lèvres closes, on ne voyait rien. Rien ne transperçait. Que la colère en dedans. Il tenta de s'écarter d'elle. S'en écarta. Crut s'en écarter.
Fit un pas dans le silence. Y retrouva les mots calmes qui seyaient à l'apparent calme de sa personne. Olympien disait-on. A connaître un peu les mythes grecs, ce n'est pas l'adjectif qu'il eut choisi lui-même. Les histoires de leurs dieux et héros ne découlent généralement pas d'une conduite ataraxique.
Que peuvent construire colère et silence ? Quel enfantement d'homme à venir ? En colère et silence. Il s'immergea dans les mots à éjaculer précocement des phrases noyées. Des saisines, des saisies brutes sur lesquelles se râper. Dans lesquelles se noyer comme dans de la sciure. Jusqu'à ce que de la bouche pleine et pâteuse plus rien n'en sorte, n'en puisse sortir. Que plus rien n'emporte. Sa voix prit encore un octave et un peu d'air. Lèvres plus fines encore.
Et encore un peu. Apprendre à respirer. Lentement. Que la respiration soit aussi douce que ces mots-sucrettes. Que la peau râpée de la voix se lisse comme l'apparence calme. Pour qu'aucune colère ne puisse remonter du larynx en s'y accrochant. Pour qu'aucune colère ne puisse redescendre en lui rencontrer et raviver la sienne. Qu'elle ne batte pavillon noir, gangrène noire partie de l'oreille, partie dedans. Un trait de lèvres légèrement retroussé.
Expirer, ne plus en être bousculer du corps des autres. Inspirer, ne pas en être ni miroir ni carnation. N'en être plus tambour, résonance où l'autre battre propre sa voix, laisser prendre prise à sa propre colère. Nulle prise. L'on comprend de moins en moins qu'il n'est pas uniquement de caractère fort que chez celui qui gueule fort. Mais la facilité raccourcit. La facilité de suivre un schème commun d'accords sans concevoir qu'il y a justement de la faiblesse dans la nécessité de devoir gueuler pour se faire entendre. Qu'il y a faiblesse à partir de l'instant où la voix se doit d'imposer le mot par le ton et sa tenue. Qu'il y a faiblesse lorsque le mot ne se tient plus. Le mot sait se suffire.
Lui bannit ces mots-là, ces tons-là. Du moins tente. Apprendre à parler, c'est apprendre à respirer. Peu à peu il respire, et à voir peut-être seulement cette palpitation trachéenne. Il ne sait pas, il ne peut pas tout effacer, tout gommer, tout lisser, mais c'est l'épaisseur du souffle qui tamponne. Il s'épaissit. Ainsi perdit-il certaines parts de ce que certains nomment cœur. Pierre friable. Pierre sans avis. Pierre. A décocher des regards de l'autre comme des coups de pied. Il en faut bientôt plus pour le bouger. L'inertie concède une force.
Dans ce trait de lèvres, l'on pouvait y voir le caractère de la résignation, alors que l'on n'entendait l'abnégation. Sur les lèvres lisses l'autre veut y lire, y mire son propre atavisme. Il y pose ses propres mots, les laisse l'emporter lui-même dans les lettres de son propre caractère, il s'emmène seul ce faisant, se prête à lui-même, lui prête ses colères, ses contradictions. Le garçon ne répond, ne rend, ne donne, ne prend la mouche, lui laisse sa merde. L'apprentissage du langage par des mots de colère inculque mieux la force du verbe et celle du silence. Il n'y avait plus de brèche en lui pour la colère de l'autre. Il s'épaissit.
Il n'y avait aussi plus de brèche en lui pour l'amour de l'autre. Plus de fissures si lui-même ne s'ébréchait. Alors lorsqu'il répondit en silence aux mots mièvres et couchés de son père. Et lorsque son père reçut le silence plutôt qu'une mascarade de gratitude pour sa carte, il ne l'appela toujours pas. Irresponsable du pouvoir des mots, ce dernier clôtura la mémoire de la naissance de son fils d'une lettre d'adieux, de reproches étouffés, de souvenirs mal placés. Toujours d'un seul côté. Il vit encore ce qu'il avait envie de voir, dit ce qu'il avait envie d'entendre. Il enverrait quand même un pécule de sa retraite pour le tout-petit, car il restait grand-père, même sans le voir.
L'homme se facilitait encore la tâche. Il n'avait pas vraiment le désir d'entendre, seulement sa propre colère, celle qu'il prêtait aussi à son fils. Lequel échangea une latitude contre une autre. Ne joua pas le jeu qu'il n'avait pas choisi. Il prit le combiné résoudre la colère de l'homme. On ne peut exiger entendre la voix de l'un sans se donner la peine de s'adresser à lui. Il lui enroba une journée pleine, un temps pressé, compressé d'impératifs, s'excusa un peu, piqua un peu sa réaction, lui rendit la dérision qu'elle n'avait pas.
Il avait appris à parler avec des mots de colère qui n'étaient pas les siens. Il apprit à répondre à la colère des siens. Il apprit à leur rendre sans y adjoindre de valeur ajoutée, sans surenchère. A l'autre de reprendre sa propre colère. Sa propre colère et la force de ses propres mots. La colère s'en revient toujours d'où elle part. Cette façon irritait, on lui prêtait tout : lâcheté, fuite, faiblesse, transparence. Néanmoins lui était debout et regardait. Lui n'avait plus besoin de gueuler.
Elle était là pourtant, dans sa gueule, la colère. Sous-jacente. Latente. Elle était là mais il n'avait besoin de l'envoyer dans la gueule des autres. Il n'avait pas besoin du miroir de l'autre pour s'y confronter, pour l'affronter. Elle redescend toujours. Elle descend toujours s'asseoir sur sa pierre. Mais il n'avait plus besoin de fronde pour la jeter. Sa force conservée lui permettait à lui de se dresser. Et de muer en roc un caillou.


 

dimanche 8 septembre 2013

Du quelque part II



 
ordre (surpiqûre)
clouté de soi
aéré, aérien
n'a rien
luxe (s'y éveiller)
dépeint à la caresse
perlés de son grain
saisi à la main
calme (déployé salon d'hiver)
mine de plomb pour tracer
chauffée de l'âtre de l'autre
volupté (ébrouer l’œil)
banc manuel
à poser le cœur
à compter l'arythmie
des ailes des heures
là (un autre jeu, encore)


 

samedi 7 septembre 2013

De la cueillette : Des Décisionnaires



 
Dans certains pays, les décisions importantes se prennent soit dans les cabinets, soit dans les chambres. En somme, présent et avenir sont joués par ceux qui chient & ceux qui pioncent.
 

 

vendredi 6 septembre 2013

Des premiers mots




(...) Apprendre à respirer. Lentement. Que la respiration soit aussi douce que ces mots-sucrettes. Que la peau râpée de la voix se lisse comme l'apparence calme. Pour qu'aucune colère ne puisse remonter du larynx en s'y accrochant. Pour qu'aucune colère ne puisse redescendre en lui rencontrer raviver la sienne. Qu'elle ne batte pavillon noir gangrène noire partie de l'oreille partie dedans. (...)


court extrait d'un travail en cours


 

jeudi 5 septembre 2013

De la transmission



 
          Dernièrement, les bavures de l'encreuse s'imprimaient sur l'écran, et plus les pages sortaient, plus le texte s'obscurcissait. Chaque page portait ses propres tâches, et toutes se répétaient, se bousculaient dans les cristaux liquides. Bientôt, il ne resterait qu'une pensée maculée sur la fragilité de quelques feuilles, et une page noire et luminescente.


 

mercredi 4 septembre 2013

Du quelque part



 

          ordre
          bien
          rangé
             à peine
              enfoui


 luxe
 dedans
bille en tête
 univers
uni


calme
s'échappe 
de plomb                            volupté
dans l'or                           intime
quelques mots                            interne
d'argent                      sur du
                                          courant
                                                        extérieur


               quelque part



mardi 3 septembre 2013

Des barrages




Quand il y a trop de choses à dire écrire
et peu de temps pour le faire bien
alors mieux ne vaut pas le faire écrire dire


lundi 2 septembre 2013

Des cérémonies



 
           Ce matin, il a endossé un costume rigoureusement noir, assorti d'un tour de cou d'humour de rigueur. Il a sorti la cire à chaussures semestrielle et la petite brosse aux poils à l'air détaché. Il aura au moins les pieds qui brillent. Avant de sortir, il brosse du revers de l'été son plus sombre chapeau, et roule le premier des derniers clopes. Ce matin, paumé parmi les dents en papier photo de mauvaise qualité, il assiste l'enterrement des vacances.