dimanche 26 août 2012

De la tête


  
  
Finalement on pense toujours être le seul à perdre la tête. On n'arrive pas à comprendre ce que les autres attendent exactement de nous. On n'arrive pas à satisfaire à leurs demandes tacites ou explicites. Tant qu'on en arrive à ne plus savoir vraiment soi-même ce qu'on attend de nous-même. Seulement, peu à peu, on s'aperçoit n'être pas seul, le seul à avoir perdu la tête. Seulement, comment s'y retrouver ensuite, avec toutes ces têtes volantes, de-ci de-là... Comment retrouver la sienne au milieu de tous ces esprits qui errent à leur corps ? On la cherche où pense-t-on l'avoir laissée, l'avoir laissée glisser hors de soi-même, involontairement, inconsciemment. On la cherche sur la ligne temporelle d'où il nous semble l'avoir perdu. On revient arpenter les allées, les bars, les verres, les grèves. On retourne ses poches, les jeans, les vestons de la penderie, les cordes de pendu pour voir, trouver. Comme s'il ne s'agissait que d'un vulgaire trousseau de clefs. Jusqu'au moment où l'on pense comprendre, l'on pense avoir compris. Ce n'est qu'un élément indépendant. On la croyait acquise, mais comme le corps, le cœur, elle reste à apprivoiser, ménager.
Elle flottera toujours à quelques centimètres au dessus de nous, taquine et farouche. Le tout est de... Le tout est de... C'est bien large... Ne pas la laisser prendre le large. Se gonfler d'hélium ou d'orgueil, de valium ou d'écueil. Ne pas la laisser prendre le large. Perdre la tête, ce n'est pas forcément ne plus l'avoir, ni la voir. Seulement un état transitoire parmi d'autres. Comprendre, accepter, reprendre, donner du mou. Envers et contre elle d'abord, les autres aussi, s'il le faut.
Après tout, on l'a perdu, la tête. Personne ne l'a volée. Après tout, elle aussi, a besoin d'un peu de liberté.
  
  
 

3 commentaires:

  1. Laisser entrer un peu d'air frais dans sa tête pour dissiper le brouillard.
    Nota : celui qui n'a pas de tête, ne peut la perdre ;)

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  2. Les esprits ardents, les hommes ambitieux, les têtes factieuses, se trouvent partout, comme les vents prêts à briser un vaisseau mal gouverné ; ce n'est donc pas des flots et des vents, mais du pilote, qu'il faut se plaindre après le naufrage.
    Louis-Philippe de Ségur (Pensées, maximes, réflexions (CCCCXXIII), p.129, Alexis Eymery, 1823)

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  3. et c'est bien le pilote qui se plaint d'avoir perdu la tête. N'en vouloir qu'à lui, pas à elle alors, si je suis le raisonnement...

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