mercredi 21 novembre 2012

De la prise du sang

  
  
Ce matin il pèle. Il pèle sur le clope jusqu'aux doigts, il pèle sur les mots dans le crâne. Dans ce cas-là, on le sent toujours venir. La main droite est refermée sur elle-même, recroquevillée. Elle ne tient rien mais ne vient rien lâcher. Ça fait plusieurs jours que je songe à cette histoire de globules. Je songe aussi à cette prise de sang. A l'analyse de mon mot, depuis plus longtemps qu'à celui de mon sang. Encore inconnus, il n'y avait pas de lien entre elles, jusqu'à ce matin. Il y a quelque chose qui se touche.
Parce que c'est un peu ça aussi, d'une certaine manière, cette extraction matinale, ou journalière tout du moins, qui demande de puiser toujours un peu plus loin dans les artères, les veines. Aller extirper quelques globules rouges, les écraser, les aplatir du doigt sur la feuille, étaler la traînée de ce qui nous nourrit le corps. Ce qui le réchauffe aussi. Comme quand on cause de quelque chose d'assez tendre, sous le microscope d'une image autant anodine qu'inattendue. Aller extirper quelques globules blancs, les écraser, les aplatir du doigt sur la feuille, étaler la traînée auto-immune qui nous protège le corps. Ce qui raffine le chef aussi. Comme quand on dépose les clauses d'une corrosion, selon l'optique de la lentille, on en voit la cause ou l'effet. Aller extirper quelques cellules bactériennes, les écraser, les aplatir du doigt sur la feuille, étaler la traînée infecte qui nous ronge les meubles et les murs. Ce qui est passage clandestin aussi. Comme quand les restes de mer crissent dans les plis, en appuyant un peu fort, on déplace les grains.
Et tout en songeant, j'oublie de penser que bientôt, les rayons vont me dépecer, ou que je vais me dessaper pour les rayons, les deux quoi. Puis je peux réécrire les mêmes conneries, parce que c'est ça aussi, cette extraction, se faire traverser par des lignes invisibles qui viennent nous fixer l'intérieur en images plus ou moins floues et en camaïeux de binaires, etc... et le même genre de triptyque aussi enflé qu'érodé...
Mais non, parce que ce matin, il pèle. Il pèle sur les doigts le bout du vent. Il pèle sur les braises du crâne. Dans ce cas-là, on ne le sent jamais finir. De deux doigts, j'efface toutes les lettres tapées en double par la main, laisse ma faute et ses orthographes, épargne un peu plus de méta-langage, et économise enfin la langue dans cette causerie de l'écriture et du quotidien, ou de l'un de l'autre. La main ne se déplie plus.
  
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